Kumi Now Année 2 Semaine 20 : du 3 au 9 mars 2020


Femmes de Gaza - Coalition des Femmes pour la Paix
La crise humanitaire à Gaza est plus pénible encore pour les femmes qui y vivent. La Coalition des Femmes pour la Paix s’efforce de leur venir en aide. Elle est aujourd’hui l’une des grandes voix du mouvement israélien pour la paix et réunit des femmes d’identités et d’origines très diverses. Vous trouverez ci-dessous ce qu’il vous faut savoir sur la situation et ce que vous pouvez faire pour que nous puissions nous lever (Koumi !) ensemble. 
Organisation
La Coalition des Femmes pour la Paix est une organisation de femmes qui se bat pour mettre fin à l’occupation israélienne de la Palestine, libérer le peuple palestinien de l’oppression, créer une société fondée sur les principes de justice et d’égalité et garantir une vie digne à tous les habitants d’Israël-Palestine.
La situation
Des associations et institutions internationales lancent l’alarme depuis des années : malgré l’aide que lui apporte la communauté internationale, Gaza est au bord d’une crise humanitaire majeure. Maintenant déjà Gaza connait une crise de l’eau, une pollution extrême, des manques d’électricité, un accès limité aux services de santé et à l’éducation, et de grandes difficultés économiques. Tout cela fait que la vie de l’ensemble des habitants de Gaza, des femmes comme des hommes, est un combat quotidien pour la survie. Cette situation est le résultat d’un siège qui dure depuis plus de dix ans et auquel se sont ajoutées de nombreuses opérations militaires sur la Bande ainsi que l’échec des tentatives de reconstruction entre les diverses attaques.
La Bande de Gaza est étroitement contrôlée par Israël et se trouve de ce fait sous occupation. Et Israël persiste à refuser de remplir les obligations que lui demande le droit international.
Et en tout cela, les femmes rencontrent toute une série de problèmes propres à leur sexe. Vivant sous occupation et en état de siège permanent, elles souffrent à la fois de la violence de l’armée israélienne et de la violence de leur propre société. Elles souffrent de manques en matière de soins de santé et d’hygiène, en matière de besoins essentiels et en matière d’emploi. La lutte contre la politique que mène Israël à l’égard de Gaza nous oblige à nous tenir à leurs côtés dans leur lutte pour leurs droits dans leur propre société.

Au cours de la guerre de 2014, 299 femmes de Gaza ont été tuées. Seize étaient enceintes. Au moins 142 familles ont perdu au moins trois de leurs membres, et 700 femmes se sont retrouvées veuves. Environ 500 000 habitants ont perdu leur logement. 20% d’entre eux n’ont toujours pas de résidence permanente. Des organisations de droits humains du monde entier alertent sur la crise humanitaire imminente qui menace Gaza. Et malgré les tentatives de remise en état grâce à des financements étrangers, il est clair que la prochaine attaque d’Israël sur la bande de Gaza n’est qu’une question de temps. Cela a lourdement pesé sur toutes les tentatives de reconstruction de ces dernières années. Les restrictions imposées au commerce et le contrôle de l’économie ne sont qu’une façon de plus pour les autorités israéliennes d’imposer leur pouvoir et leur violence, et cela affecte tous les domaines de la vie. Ce n’est qu’après la levée du siège et la fin de l’occupation que nous pourrons vraiment commencer à restaurer les vies, les familles et l’économie.
Voici quelques propos tenus par des femmes de Gaza qui ont participé le 29 mars 2017 à notre vidéoconférence ‟Femmes par-delà l’état de siège” à Jaffa :
Noor Swirki : « Le siège à des incidences directes et indirectes sur la vie des femmes. Indirectement il impacte la vie de toute la société, et la société rejette le fardeau sur les jeunes femmes qui ont ainsi à supporter deux formes de pressions : celle d’une société patriarcale qui ignore les rêves et les espoirs des jeunes femmes, et celle d’une société qui subit un siège pesant. »
Ola Amer Al-Jup : « Lorsque des femmes palestiniennes ont perdu un mari, un père, un fils ou un frère lors de la guerre de 2014, c’est le principal pourvoyeur de la famille qu’elles ont perdu. Elles sont alors devenues elles-mêmes le principal pourvoyeur. Nous demandons au monde entier de soulager les souffrances des femmes palestiniennes de la Bande de Gaza. »
Hiba Al-Danf : « La guerre de 2014 est toujours présente dans la tête de toutes femmes palestiniennes, et affecte quotidiennement leur énergie et leurs relations avec leur famille. Celles qui ont subi une perte et celles aussi qui n’en ont pas subie craignent toutes de se trouver un jour en situation de deuil. »

Un récit : Aya Bsheer, habitante de Gaza
Mon militantisme est politique, social et culturel. L’un des principaux défis auxquels je fais face est tout simplement de vivre à Gaza, assiégée depuis plus de sept ans maintenant. À cause du blocus je n’ai pas pu profiter de plusieurs occasions de voyager et d’étudier à l’étranger. Ce blocus est catastrophique, non seulement pour mon autonomie et ma liberté de mouvement, mais aussi pour mon développement intellectuel et culturel. J’ai plein d’ambitions, mais ce que nous impose le blocus, la guerre que nous avons connue et l’occupation à la fois directe et indirecte m’empêchent de réaliser ce que je souhaite.  
Je milite en faveur de la campagne de Boycott, Désinvestissement et Sanctions contre Israël, internationalement connue comme BDS. Je me suis engagée dans la campagne immédiatement après l’attaque de 2008-2009 contre Gaza. C’est surtout le sentiment d’impuissance que j’ai éprouvé pendant la guerre qui m’y a poussé. Je considère la campagne de boycott comme une arme de résistance et un moyen de montrer au monde le vrai visage d’Israël.
Je voudrais insister sur la nécessité de mettre fin à l’occupation, parce qu’elle est illégale. Je ne pense pas qu’y mettre fin apporterait automatiquement une solution au conflit israélo-palestinien. Il nous faudra encore parler du retour des réfugiés. Personnellement, je soutiens l’idée de vivre dans un seul État, démocratique et laïque pour tous, sans distinction de race, de religion ou de sexe. J’aimerais aussi voir une certaine vie culturelle à Gaza : nous n’avons pas de théâtres ici, ni de cinémas, ni de concerts…
Lors des attaques contre Gaza je militais à un niveau individuel et me consacrais à de l’aide humanitaire pendant les « cessez-le feu humanitaires », le plus souvent violés par l’armée israélienne pour tuer encore plus de gens.
J’écrivais aussi en anglais sur ce que je vivais, sur la réalité qui était la nôtre, et je diffusais cela par internet pour que le monde puisse connaître ce qu’était la vie à Gaza sous les frappes aériennes et au milieu de toutes les destructions.
Je ne pense pas qu’il y ait une seule personne à Gaza qui n’ait pas souffert au cours de la guerre. Nous avons tous souffert, au moins psychologiquement, même si nous essayions quelquefois de ne pas le laisser voir. Lors de la dernière attaque, j’ai perdu plusieurs amies et parents. D’autres se sont trouvées handicapées, ou sans domicile après la destruction de leur logement, tandis que d’autres amies encore perdaient leur emploi à la suite du bombardement de leur lieu de travail…
Nous habitons la ville de Deir al-Balah, au centre de la Bande de Gaza. C’est pourquoi beaucoup de parents étaient venus chercher refuge dans notre maison, même si elle n’était plus sûre. Aucun endroit n’était sûr à Gaza, et il n’existe aucun lieu à Gaza aujourd’hui qui n’ait connu destructions et souffrances. Il n’y a toujours ni électricité, ni eau potable, ni médicaments d’urgence ni infrastructures. Des milliers de maisons restent détruites. Et le comble, c’est que personne ne peut quitter la Bande ! L’éducation aussi va mal, et le chômage n’a cessé d’augmenter.
Les défis ne manquent pas, ni les pressions sociales pour gêner ou arrêter mes divers engagements. Mais je considère que c’est surtout l’occupation qui alimente ces pressions. Si Gaza n’était pas assiégée comme elle l’est, cela fait longtemps que j’aurais pu me rendre ailleurs en Palestine pour y travailler et y être indépendante. La situation actuelle ne fait qu’augmenter la pression sociale, et cela me déprime.
Lorsque je milite à Gaza, je ne me heurte pas directement à l’occupation mais elle est là, tapie dans chaque coin de la Bande. Elle nous agresse à distance. Même s’il n’y a pas d’engagement direct, elle est une entrave à notre vie et à notre activité.
Publié par la Coalition des Femmes pour la Paix dans « Voici ce qui s’est passé : Témoignages de femmes qui défendent les droits humains et résistent à l’occupation israélienne » : http://www.coalitionofwomen.org/wp-content/uploads/2017/07/WHRD-english-web.pdf
Action
Remplacez sur votre compte Facebook et tous vos médias sociaux le nom de votre localité par celui de Gaza pendant une semaine, et joignez-y une photo qui demande « Ouvrez Gaza », …en solidarité avec les gens qui y vivent réellement. Vous pourriez aussi partager sur les réseaux sociaux l’une des courtes vidéos proposées ci-dessous comme Ressources. Et n’oubliez pas le lien avec cette page du projet Kumi et avec la page web de la Coalition des Femmes pour la Paix (CWP, en anglais de préférence !). Avec les hashtags #OpenGaza, #KumiNow, et #Kumi20.
Un poème de Suheir Hammad : “Gaza”
un grand miracle s’est produit ici  
une fête des lumières
une coulée de plomb sur des enfants
et une armée qui faisait la fête le jour de l’épiphanie
je ne sais rien, sous le soleil, du mur dont personne ne parle
certains doivent mourir enveloppés dans un tapis de pétrole en fleurs
sans la moindre couverture médiatique
j’ai connu l’Armageddon au quotidien
une échelle abandonnée
six chandelles brûlent toute une maison
un cheval attaché à la fumée
certains doivent mourir pour le faire savoir
cri ininterrompu, fleuve au courant puissant, mémoire plus longue que des vies
les vivants veulent mourir dans leur pays
pas de portes ouvertes pas de mers ouvertes  pas de mains ouvertes
le cœur qui déborde, cinq filles enveloppées de blanc
chaque jour jihad
chaque jour confiance surmontant la peur
chaque jour un miroir de feu
les vivants veulent mourir avec leur famille
la fille perd des membres son frère ramasse des bras
certains doivent mourir pour ne pas mourir
des enfants sur le sol de l’hôpital la mère à côté d’eux
le père en état de choc voilà ma famille
je les ai manqués voilà ma famille dont je
n’ai pas redressé la tête je les ai enterrés
ma famille que vais-je faire  maintenant ma famille est pain
un poisson un peuple taillé en pièces
voilà qu’une soif vole la vie
voilà une faim un hiver dans l’hiver
certains doivent mourir pour apporter le salut
je suis venu aux temps de la fin toujours présents
la femme a perdu des parents ses enfants et crie
ma sÅ“ur j’ai perdu ma sÅ“ur je veux mourir
les yeux de ma sœur étaient miel sa voix source
je ne peux supporter cela dieu seul dieu seul ma sœur
des infirmiers tués des écoles frappées des convois bombardés
les blessés se meurent les morts sont enterrés en trois
heures les gens prient ensemble et maudissent les gens
pleurent bruyamment et en silence toujours trop fort pas assez
certains doivent mourir parce qu’ils sont d’à côté
certains doivent mourir parce que c’était écrit
aucune armée ne s’excuse ne s’est jamais
excusée l’autorité poursuit l’assemblée de papier
l’occupation s’installe plus profondément
un grand miracle ici
les vivants meurent et les mourants vivent
une fête de lumières
une bande une terre un brasier
la mer un miroir de feu
une coulée de plomb sur des enfants
leurs têtes arrachées de leurs épaules roulent dans les rues
leurs coiffures tournent dans les mains
une armée qui fête le jour de l’épiphanie
qui fait entrer l’avenir dans l’histoire
qui porte des torches dans des femmes
Suheir Hammad est poétesse, auteure et militante. Née en Jordanie elle est la fille de deux réfugiés palestiniens. On peut voir Suheir Hammad produire sa Suite de Gaza au Festival palestinien de littérature : https://www.youtube.com/playlist?list=PL24665C51CAFAC0DB. On peut également voir une vidéo de sa prestation à la conférence TED sur : https://blog.ted.com/text-of-what-i-will-by-suheir-hammad/.
Ressources (en anglais)
“No Way Out : Women Trapped in Gaza Away from Their Homes and Partners” de B’Tselem : https://www.btselem.org/gaza_strip/20180308_women_trapped_in_gaza 
“Gaza Situation Report 203” de l’UNRWA : https://www.unrwa.org/newsroom/emergency-reports
“Israel/Palestine Events of 2016” de Human Rights Watch: https://www.hrw.org/world-report/2017/country-chapters/israel/palestine
“Women Beyond the Siege” (ensemble d’articles) de Coalition of Women: http://www.coalitionofwomen.org/english-women-beyond-the-siege-collection-of-articles/?lang=en
“This is What Happened”, de Coalition of Women: http://www.coalitionofwomen.org/3969-2/?lang=en
Vidéos de femmes traitant de ce qu’est la vie sous occupation israélienne, de CWP (en anglais) :
Autres vidéos (également en anglais) :
“Voices from Gaza: Women at Work, the Balch Falestin Plant” de B’Tselem : https://youtu.be/yoegHIjbf0M
“Working Women of Gaza” de B’Tselem: https://www.btselem.org/video/149119
“Path to Gaza: International Activists” de Femmes pour la Palestine : https://youtu.be/iI2J1vgf7do



Traduit par les Amis de Sabeel France

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