De Bethléem, un message pour
Noël 2018
L’ange
dit aux bergers : « Je viens vous annoncer une bonne nouvelle, qui
sera une grande joie pour tout le peuple : il vous est né aujourd’hui,
dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur. »
(Luc
2, 10-11)
Le
Christ est né à Bethléem. Depuis deux mille ans, des prières et des chants de
Noël ont résonné à Bethléem, et chaque année la joie est renouvelée dans le
cœur des gens. Aujourd’hui, en 2018, Bethléem célèbre encore cet événement,
glorifie Dieu, prie et se réjouit. Cependant, cette joie n’est pas entière. Il
n’y a pas de joie dans le cœur des gens, dans la ville et dans les camps de
réfugiés qui l’entourent, parce que la ville n’a pas droit à sa dignité et à sa
liberté, et qu’elle est coupée de Jérusalem par le mur de séparation,
Jérusalem, la ville de leur foi et de leurs prières, leur capitale spirituelle
et politique.
De nos
jours, à Noël, les chrétiens de Jérusalem se tournent vers Dieu :
« Regarde et vois, depuis le ciel » (Isaïe 63,15), et lui demandent
d’avoir pitié.
À
l’occasion de Noël, Bethléem lance un appel pour que le regard se porte sur
elle et sur ses habitants, ceux pour le salut desquels le Sauveur est né, ceux
qui vivent sous l’occupation et l’oppression des autres, ceux à qui liberté,
dignité et indépendance sont refusées. C’est un appel à tous ceux qui croient
en la justice et en la paix, pour qu’ils permettent aux habitants de Bethléem
de se réjouir au moment de Noël en œuvrant pour le rétablissement de leur
liberté, de leur dignité, et de leur indépendance.
Frères
et sœurs, nous vous adressons cette année ce message de Noël avec pour
titre : « Une espérance nouvelle pour la Palestine, le Moyen-Orient
et le Monde ». […] « Une Espérance nouvelle », en dépit de la
cruauté de l’homme envers l’homme, en dépit des guerres, de la mort et de la
haine qui continuent à sévir sur la terre de Dieu. En effet, parce que c’est la
mort qui guide les cœurs et que l’injustice augmente, nous avons besoin qu’une
lumière et une espérance nouvelles émanent du cœur de tous ceux qui croient au
message de Noël. Alors, la joie de Noël sera pleinement présente à Bethléem, où
le mystère de Noël atteint la Terre, là où règnent l’oppression causée par
l’homme et la souffrance des opprimés. Chez les hommes de bonne volonté,
l’hymne des anges fait naître une espérance nouvelle dans le ciel de
Bethléem : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur terre
aux hommes de bonne volonté » (Luc 2,14). Les hommes de bonne volonté sont
ceux qui recherchent la paix pour tous sans exception, ceux qui pensent que la
terre de Dieu n’est pas un lieu pour les meurtriers, mais un endroit où les
gens font la paix. Quand la paix est refusée à certains, Noël est pour eux une
occasion d’essayer de rétablir et de protéger la paix, comme un témoignage
rendu à tous les peuples de la terre.
Chaque
célébration de Noël nous rappelle quelle est la vraie nature de notre pays, sa
mission et son message. Il s’agit de la terre de Dieu, où il n’y a pas de place
pour ceux qui veulent la guerre, quels que soient leurs objectifs, leurs
politiques, leurs armes ou leur capacité à tuer. Paix sur terre et espoir
nouveau aux faiseurs de paix, qui méritent d’être appelés enfants de
Dieu : « Heureux ceux qui font œuvre de paix, ils seront appelés fils
de Dieu » (Matthieu 5, 9).
Noël
est pour nous la réalisation de la parole du Dieu éternel : « Et le
Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Jean 1, 14). Il a vécu
parmi nous et il nous a appris le nouveau commandement : « Aimez-vous
les uns et les autres comme je vous ai aimés ». Il a aimé les pauvres et
il a pris soin d’eux, ainsi que des opprimés et des exclus. Il a apporté un
espoir nouveau à tous ceux qui étaient désireux de l’écouter.
Aujourd’hui,
à Bethléem et dans toute la Palestine, et aussi dans Israël, Jésus-Christ
regarde les pauvres et les opprimés et leur apporte l’espoir. Aujourd’hui, il
se tient devant le mur de séparation et il offre un commandement d’amour et de
force qui, seul, peut abattre les murs, apporter sécurité et protection, et
guider les cœurs des agresseurs afin qu’ils cessent leurs attaques et mettent
un terme à l’occupation qu’ils imposent.
Vous
qui croyez au symbole de Noël, tenez-vous debout aujourd’hui au côté de Jésus,
face à l’occupation et au mur. Pensez à ce que vous pouvez faire pour détruire
ce mur et mettre un terme à l’occupation, qui est la marque de l’oppression
d’un peuple envers un autre, afin que la joie de Noël revienne pleinement à
Bethléem et sur toute la terre.
Ceux
qui célèbrent Noël savent que Dieu est amour, pas un dieu des armées et des
guerres, ni un dieu qui ordonne à un peuple d’en opprimer un autre, ou un dieu
qui prive certains de leur terre pour la donner à d’autres.
Noël
est aussi le jour des réfugiés. Jésus est né à l’extérieur de la ville, pas
dans une maison, mais dans une grotte voisine. Enfant, il a trouvé refuge en
Égypte, afin de se soustraire à l’oppression des puissants de l’époque. Jésus
marche aujourd’hui parmi les foules de réfugiés ; il marche avec eux et
pour eux, enseignant, soignant, donnant la vie, et demandant aux puissants de
cesser de tuer et de déplacer des gens. Jésus dit aux dirigeants de ce
monde : « Déposez vos armes et cessez de tremper votre pain dans le
sang du peuple du Moyen-Orient. Rengainez vos glaives et transformez-les en
outils de vie, comme l’a dit le prophète : "Martelant leurs épées,
ils en feront des socs, de leurs lances ils feront des serpes. On ne brandira
plus l’épée nation contre nation, on n’apprendra plus à se battre" (Isaïe
2, 4). »
Une espérance
nouvelle en Palestine et au Moyen-Orient ne peut être apportée par les dieux de
la terre, mais plutôt par les pauvres, ceux qui combattent le Mal, ceux qui ont
soif de droiture, de justice, et de paix.
Une
joie nouvelle et un espoir nouveau pour la Palestine seront aussi joie et espérance
pour tout le peuple de Terre sainte, de Palestine et d’Israël, quand tous
seront capables de voir la gloire de Dieu, qui, le soir de Noël, est apparu aux
gens les plus simples et s’est dissimulé à la vue des puissants (Luc 2, 9).
La gloire de Dieu nous rend capables d’amour et nous permet de construire une
terre sainte à l’image de Dieu, une terre où il n’y a ni opprimés ni
oppresseurs, pas de murs, pas d’occupation, pas d’obscurité, mais plutôt une
grande lumière, et un grand amour qui remplit le cœur de tous.
Depuis
Bethléem, je vous souhaite une période d’Avent et une fête de Noël pleines de
sainteté, de justice, et d’amour.
S.B.
Michel Sabbah
Patriarche
latin émérite de Jérusalem
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