Vague de prière pour le jeudi 25 avril 2024

Le 19 avril, la défense aérienne iranienne a abattu des drones au-dessus d'Ispahan, selon les médias iraniens officiels. Cela a encore fait monter les tensions régionales après les représailles iraniennes contre Israël suite à une attaque contre des bâtiments diplomatiques iraniens en Syrie. L'intervention d'Israël s’est produite après que les États-Unis auraient approuvé un projet israélien d’attaque contre Rafah, dans la Bande de Gaza, en échange de l’accord d'Israël de ne pas lancer une attaque militaire générale contre l'Iran. Entre temps la Bande de Gaza continue à être bombardée, et le nombre de morts y augmente d’heure en heure.

Prince de la paix, alors que beaucoup d'entre nous craignent de nouvelles escalades militaires régionales, aide-nous à ne pas oublier tes précieux enfants de Gaza qui continuent de souffrir terriblement. Seigneur, comme elles sont horribles, ces puissances impériales qui se servent de la vie des Palestiniens comme de pions pour maintenir un statu quo de violence permanente ! Nous voulons de notre côté continuer à croire que tu es un Dieu juste, et nous souvenir de ces paroles du prophète Isaïe : « Quel malheur pour ceux qui établissent des règles injustes, qui mettent par écrit des lois qui causent la misère des autres. De cette façon, ils empêchent les pauvres d’être jugés avec justice, ils privent de leurs droits ceux qui, dans mon peuple, sont sans défense. Ils volent les veuves, ils pillent les orphelins » (Ésaïe 10.1-2). Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Le 18 avril, la professeure Nadera Shalhoub-Kevorkian a été arrêtée à son domicile dans la Vieille ville de Jérusalem, soi-disant pour incitation au terrorisme, à la violence et au racisme. Lors de son arrestation, la police a également confisqué son téléphone portable, son ordinateur, toutes sortes de documents et des livres de l’auteur américano-palestinien Mahmoud Darwish. Cette arrestation a eu lieu suite à une campagne menée par des étudiants, des militants de droite et divers politiciens. La professeure Shalhoub-Kevorkian a ensuite été remise en liberté, en attendant de nouveaux interrogatoires.

Ô Divin créateur, nous sommes inquiets et en colère suite à l'arrestation de la professeure Shalhoub-Kevorkian, une arrestation qui viole autant le droit à la liberté d'expression que la liberté académique, et nous te sommes en même temps reconnaissants pour les courageux penseurs palestiniens qui, par leur militantisme et leurs publications, osent défier les structures d’injustice. Rappelle-nous, Seigneur, que notre amour pour toi doit se vivre de tout notre esprit, et s’il te plaît : Protège la professeure Shalhoub-Kevorkian et défends-la contre toute fausse accusation et contre toute calomnie. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Ce 24 avril, Sabeel organise son 4ème webinaire en vue de sa Conférence internationale de novembre 2024 dont le thème sera« Défier l’apartheid et l’extrémisme religieux ». Ce webinaire, sur le thème « Christophobie et persécution des chrétiens », veut montrer comment le sionisme chrétien exacerbe les tensions dont sont victimes les chrétiens palestiniens. Il donnera la parole à des experts tels que le Révérend Dr Waltrina Middleton, le rabbin Brant Rosen et le Révérend Dr Paul McAllister.

Ô Dieu incarné, dans la grande tradition prophétique du christianisme palestinien, Sabeel résiste depuis des dizaines d’années au sionisme chrétien. Alors que ton nom continue à être invoqué dans un contexte de suprémacisme et de haine qui défigure ta dimension d’inclusivité et de justice, les pierres vivantes que nous sommes souffrent beaucoup des attitudes de nos coreligionnaires sionistes chrétiens et nous ne pouvons que les exhorter à se repentir. Que ce webinaire nous rappelle que « Celui qui a de la haine pour son frère se trouve dans l’obscurité ; il marche dans l’obscurité et ne sait pas où il va, parce que l’obscurité l’a rendu aveugle » (1 Jean 2.11). Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Rencontre autour du livre de Munther Isaac "L'autre côté du mur", Paris 22 mars 2024

COMPTE-RENDU DE LA RENCONTRE DU 22 MARS 2024

Munther Isaac, L’Autre Côté du mur - Un récit chrétien palestinien de lamentation et d’espoir, traduit et édité par Amis de Sabeel France, diffusé en partenariat avec Editions Golias, 2023.
Présentation et analyse par Nicolas Guérin, prêtre catholique et Patrice Rolin, pasteur protestant, théologien et bibliste.

I. Introduction de Laurent Baudoin, traducteur du livre en français

Depuis près de six mois, les habitants de la bande de Gaza vivent une tragédie qu’on peut qualifier de génocide, à l’instar de la Cour Internationale de Justice et de la plupart des observateurs et des organisations des droits humains. Le scandale est d’autant plus grand que l’auteur de ce crime, l’Etat d’Israël, se refuse à appliquer les injonctions de la Cour Internationale dans son ordonnance du 26 janvier 2024, qui demande que tout soit fait pour éviter le génocide. En empêchant l’acheminement et la répartition de l’aide humanitaire, Israël soumet les Gazaouis à la famine, utilisée comme arme de guerre, une stratégie d’une cruauté inimaginable.Face à ce drame qui bouleverse la conscience humaine, les dirigeants occidentaux tergiversent et les Eglises se taisent ou réagissent avec lenteur et parcimonie. Aussi les croyants doivent-ils se poser la question : qu’aurait dit, qu’aurait fait le Christ en pareille circonstance ? Le silence est-il chrétiennement acceptable ?
Elever la voix, expliquer et informer sur l’injustice vécue par le peuple palestinien depuis des décennies voire siècle, c’est ce qu’a entrepris, bien avant le 7 octobre 2023, le théologien Munther Isaac, pasteur de la paroisse luthérienne de Noël à Bethléem, et figure reconnue du mouvement Sabeel qui porte la voix des chrétiens palestiniens en Terre sainte et à l’extérieur, dans le sillage de la théologie de la libération.
Son livre,
L’Autre Côté du mur, est un vibrant plaidoyer pour ces chrétiens palestiniens, méconnus voir méprisés par les chrétiens occidentaux, alors que, bien que très minoritaires mais très respectés par les Palestiniens musulmans, ils ont beaucoup à nous apprendre sur la foi qui, telle une lumière dans l’obscurité de l’oppression, révèle toute la force de sa promesse.
Nicolas Guérin et Patrice Rolin ont bien voulu associer leurs voix pour nous parler de ce livre majeur.

II. PRESENTATION DES CHAPITRES

Introduction (Nicolas Guérin)

Distance et euphémisation. La réalité, même si elle est à distance, c'est vraiment la réalité, le cri est un cri, le mur est un mur. C'est ça que l'auteur nous demande d'écouter et d’accueillir. Le cri est l'expression d'une souffrance ; qu'en faisons-nous ici, avec la proximité de Jésus comme source de résistance non violente ? C’est ce que nous allons voir.
Le cri est une interpellation à connaître, à mieux comprendre, à compatir, à conjuguer foi, justice et paix.

Chapitre 1 : Une invitation (Nicolas Guérin)

Le chapitre commence par cette phrase étonnante : « C’est parce que vous êtes palestinien ! » Et alors ? Cette phrase, qui en dit déjà long, est celle que l'auteur a entendue comme argument donné par les organisateurs d'une conférence de la mission chrétienne en Irlande pour lui refuser de prendre la parole. C'est la question de son existence même, de son appartenance à la Palestine qui est signifiée ici. Il n'y a rien de plus basique qu’une phrase pareille. Alors, se demande-t-il, Dieu nous aime-t-il autant que les autres ? Est-ce que Dieu aime les Palestiniens ? Quelle est la place des Palestiniens dans le plan de Dieu ? A cela s’ajoute ce qu'on entend beaucoup : la menace démographique car, pour certains, les Palestiniens sont trop nombreux, etc.

L'auteur nous propose l'histoire de son parcours de vie et la découverte du sens de sa vocation. Il est chrétien, arabe, palestinien, pasteur, luthérien évangélique, ça fait beaucoup… Autant d'étiquettes c'est parfois dangereux, cela peut constituer autant de barrières. « Arabe », précise-t-il, dit la langue et la culture, mais pas directement l'ethnicité ou la religion. « Palestinien » dit la terre, le pays, le peuple. On verra que ceux qui utilisent ces catégories le font avec des acceptions parfois différentes voire des confusions. Munther Isaac dit que son espoir, c'est de sortir de l’opposition mortifère exclusive d’Israël et de la Palestine pour qu’Israéliens et Palestiniens puissent un jour partager cette terre.

Il donne ensuite un aperçu rapide de l'histoire des Palestiniens sur cette terre, avec entre autres cette conclusion que le fait d'avoir été occupé est un élément crucial pour comprendre l'identité palestinienne. Aujourd'hui tous les Palestiniens, quel que soit leur statut, sont sous occupation israélienne. En Israël même, où ils sont 1,8 million (20 % de la population), ils sont considérés comme des citoyens de seconde classe. Dans les territoires occupés où ils sont 4,8 millions, tout est problématique, tout est contrôlé par Israël : la terre, l'eau, la sécurité...

L’injustice et l'inégalité décrivent la vie en Palestine aujourd'hui. L’auteur a grandi à Bethléem. Il avait 8 ans lors de la première intifada en 1979, et 20 ans lors de la 2e Intifada. L'enfant et le jeune homme ont connu l’invasion, les fusillades, le couvre-feu, les milliers de morts et de blessés ; tout cela a constitué un tournant dans sa vie. Comment dès lors donner du sens à sa religion, à sa foi ? Il grandit à Bethléem dans une petite église évangélique très désengagée du monde de l'époque. Au Moyen-Orient – comme ailleurs – la politique et la religion sont étroitement liées, avec des revendications de toutes sortes pour la possession de la terre, des prétentions fondamentalistes juives d'un côté, palestiniennes de l'autre, sans compter les chrétiens sionistes, en particulier les évangéliques américains. D’où le mur de 8 mètres de haut justifié par des raisons de sécurité, en fait un non-sens qui sert à l'accaparement des terres. En conséquence, les Palestiniens deviennent invisibles, comme inexistants, déshumanisés, d'où l'invitation à aller de l'autre côté du mur. L'autre côté du mur, c'est d'abord une invitation à écouter.

Vague de prière pour le jeudi 18 avril 2024

Le 13 avril, l'Iran a lancé des centaines de drones et de missiles en direction d'Israël après avoir annoncé des représailles suite à l’attaque meurtrière israélienne contre son consulat à Damas, la capitale de la Syrie. La quasi-totalité des missiles et des drones a été interceptée, mais une fillette de 7 ans, Amina al-Hassouni, a été grièvement blessée par des éclats de missiles et une base aérienne israélienne a été légèrement endommagée. Beaucoup craignent qu’une réponse d'Israël à l'attaque iranienne ne dégénère en un conflit régional majeur.

Dieu de la paix, beaucoup d'entre nous ont peur qu’une guerre n’éclate sur toute la région. S’il te plaît, guéris les blessures de la jeune Amina, et que ta présence réconforte sa famille. Seigneur, interviens auprès de ceux qui sont en position de pouvoir prendre des décisions, afin qu’ils mettent rapidement en place les bases d'une paix juste et globale pour toute la région. Et aide-les à comprendre que cela n’est possible qu’en mettant un terme à la souffrance des Palestiniens. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Le week-end dernier, des centaines de colons israéliens armés ont pris d'assaut des villages de Cisjordanie et y ont incendié des maisons et des voitures, tuant au moins deux personnes et en blessant beaucoup d’autres. Cela a été l'une des plus importantes attaques menées par des colons cette année. Ils voulaient venger la mort d’un jeune colon de 14 ans qui avait été retrouvé mort en Cisjordanie. Depuis le 7 octobre, les raids de colons et de soldats israéliens contre les villes et les villages de Cisjordanie n’ont cessé de se multiplier, tuant des centaines de Palestiniens.

Dieu de la justice, nous sommes tristes à cause de tous ceux qui ont été tués par des actes de violence et de haine. Le sang de tant de personnes coule sur notre terre. Aide-nous, Seigneur, à comprendre la raison de toutes ces tragédies et à résister à toute violence. Rends chaque personne et chaque organisation consciente de ses propres responsabilités dans les situations d’injustice que connaît la Cisjordanie, et accompagne ceux qui vivent un deuil et qui ont peur. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Début avril, un groupe de colons israéliens accompagné d’officiers de police israéliens a pénétré dans le Quartier arménien de la Vieille ville de Jérusalem, où règnent de fortes tensions suite à la location par un investisseur juif australien de l’espace connu comme le « Jardin des vaches ». Les colons et les policiers se sont alors mis à agresser des Arméniens et à vandaliser leurs propriétés. Les tensions qui existent depuis plus de deux ans ont connu une recrudescence ces dernières semaines. Les membres de la communauté arménienne affirment que la perte de l’espace du « Jardin des vaches » constituerait une menace existentielle pour l’avenir de leur communauté et porterait atteinte de manière irrémédiable à la diversité de la ville de Jérusalem.

Dieu d'inclusion, la beauté de notre peuple est comme une mosaïque aux multiples couleurs, mais le suprémacisme et l'exclusivisme menacent de détruire le dynamisme de notre société. S’il te plaît, interviens et mets fin aux agressions de la police et de la municipalité israéliennes et à celles des colons : elles sont une menace existentielle pour l’avenir de la communauté arménienne locale. Donne de la joie et une inébranlable détermination à la communauté arménienne de Palestine là où elle s’oppose à sa propre élimination. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Vague de prière pour le jeudi 11 avril 2024

 La semaine dernière, l'armée israélienne s'est retirée du plus grand hôpital de la bande de Gaza après l’avoir occupé durant deux semaines, laissant derrière elle des scènes de dévastation. Des sources locales qui ont été témoins d'atrocités pendant plus de 180 jours nous disent que ce qui s’est passé à l'hôpital Al-Shifa est « indescriptible ». Les photos, les vidéos et les récits des témoins oculaires font état de tortures, de meurtres et de destructions inimaginables. On ne connaît pas encore le nombre de morts puisque les corps ne sont plus identifiables, mais l'agence de défense civile de Gaza affirme qu'au moins 300 Palestiniens ont été tués dans et autour de l'hôpital. L’hôpital Al-Shifa lui-même est complètement hors service.

Dieu de guérison (« shifa » en arabe, comme dans le nom de l’hôpital), combien de morts, de destructions et de tortures notre peuple devra-t-il encore endurer ? Combien de vies palestiniennes devront encore être fauchées pour que le reste du monde réagisse enfin ? Pourquoi ne mets-tu pas fin à cette horreur, Seigneur ? Toi, Homme de douleurs, aide-nous à être des témoins de Ton amour et aussi des souffrances des opprimés, même s'il nous est difficile de voir ta présence parmi nous, « car nous marchons par la foi, non par la vue » (2 Corinthiens 5.7). Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

La semaine dernière, les législateurs israéliens ont approuvé à une écrasante majorité une loi qui donne aux ministres le pouvoir de bloquer temporairement les réseaux d’information étrangers s’ils les considèrent comme un risque pour la sécurité. Le Premier ministre Benjamin Netanyahou a déclaré qu'il « agira immédiatement » selon cette loi, en mettant fin aux activités de la chaîne Al-Jazeera.

Dieu de vérité, nous sommes inquiets suite à cette récente loi israélienne, car elle restreint la liberté de la presse et la liberté d'expression. Nous savons que ceux qui commettent le mal veulent agir dans l’obscurité, et que ceux qui mettent en lumière leurs actes sont une épine dans leurs pieds. Seigneur, aide-nous à lutter contre la désinformation politique et la censure. Nous te sommes reconnaissants pour les courageux journalistes de Gaza qui vont jusqu’à se sacrifier pour donner la parole à ceux qui ne l’ont pas et pour faire connaître la vérité dans un monde de tromperie sans bornes et d’immense confusion. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Le 1er avril, l’armée israélienne a tué sept personnes d’un convoi humanitaire de l’ONG World Central Kitchen à Gaza. Malgré la coordination entre World Central Kitchen et l’armée israélienne, les marquages sur les véhicules portant le logo de l’ONG et leur déplacement dans une « zone sans conflit », le convoi a été touché. Suite à cette attaque, des centaines de tonnes d'aide vitale destinées aux habitants de Gaza ont dû être renvoyées à Chypre. Depuis le 7 octobre, près de 200 travailleurs humanitaires sont morts à Gaza, en majorité des Palestiniens.

Dieu de la vie, aide-nous à comprendre que le meurtre des travailleurs de l’ONG World Central Kitchen et de centaines de travailleurs humanitaires palestiniens est une agression envers tous ceux qui tentent d'apporter une aide dans les situations les plus horribles que notre monde puisse connaître. Nous te remettons la vie des nombreux ‘Bons Samaritains’ qui ont été martyrisés dans notre pays, qu'il s’agisse de travailleurs internationaux ou de Palestiniens. Souvenons-nous de ce proverbe : « Tel fait des largesses et s’enrichit encore, tel autre épargne plus qu’il ne faut et connaît l’indigence » (Proverbes 11.24). Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Sabeel a appris avec tristesse la nouvelle du décès soudain de Guy Fabreguettes, un ami de Sabeel et le trésorier des Amis de Sabeel France. Sabeel présente ses condoléances à la famille de Guy et à tous ses proches et se joint aux Amis de Sabeel France dans leur deuil. Guy est décédé le 1er avril, lundi de Pâques.

Dieu de miséricorde, nous te confions Guy Fabreguettes et tous ceux qui pleurent sa perte. Tu es un Père bon et plein d’amour, et tes bénédictions se renouvellent chaque matin. Sois aux côtés de la famille de Guy qui pleure sa perte. Que Ton Esprit Saint réconforte tous ceux à qui il manque. Avec eux tous, nous nous souvenons de ta promesse de résurrection : la mort ne sera plus, et la victoire de l'amour sera éternelle. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Vigile de Pâques, Bethléem, 30 mars 2024

Vigile de Pâques pour Gaza, Bethléem, samedi 30 mars 2024, Rév. Dr. Munther Isaac :

Cette année nous vivons le temps de Pâques en Palestine dans un contexte particulièrement difficile : Cela fait 175 jours maintenant qu’un génocide a commencé. 175 jours de bombardements, d’état de siège, de famine. Jamais je n'aurais pensé que ce serait encore le cas à Pâques. J’étais sûr que toute cette violence sera alors derrière nous. Je pensais que les dirigeants du monde avaient une conscience. Apparemment je me suis trompé.

Aujourd'hui, nous sommes entrés dans une nouvelle phase de cette guerre de génocide dans laquelle les habitants de Gaza sont tués par la faim, par la soif et par les maladies. On les affame jusqu’à la mort. Une mort lente… Ils sont suspendus entre ciel et terre, à mourir lentement sous le regard du monde entier. Ils n'ont ni aspect ni gloire pour que nous les admirions, eux dont les humains détournent le regard.

Il a fallu plus de 5 mois, et 32 000 morts dont 13 000 enfants, pour que le Conseil de Sécurité des Nations unies demande enfin un cessez-le-feu ! Mais sur le terrain rien n'a changé. Depuis quand Israël se soucierait-il des résolutions de l'ONU ? Israël n'a jamais été tenu pour responsable, jamais été condamné par les dirigeants de l’occident. Cela reste le plus grand problème aujourd'hui.

Ce que nous demandons maintenant, c’est qu’au moins l'aide et la nourriture puissent entrer dans la bande de Gaza. Nous avons renoncé à exiger un cessez-le-feu. Mais : Laissez entrer de la nourriture, de l'eau, et des médicaments ! …Seigneur, prends pitié !

Mes amis, un génocide a été normalisé. Comme gens de foi, si nous prétendons vraiment suivre un Sauveur crucifié, nous ne pourrons jamais accepter cela. Jamais nous ne pourrons accepter qu’un génocide soit normalisé. Jamais nous ne pourrons accepter que des enfants meurent de faim, non pas à cause de la sécheresse ou de la famine mais à cause d'une catastrophe mise en place par des humains ! À cause de l'Empire.

C’est cela la réalité : un génocide a été normalisé tout comme l’a été l'apartheid en Palestine, et auparavant en Afrique du Sud. Tout comme l’ont été l'esclavage et le système des castes. Il est devenu évident que les dirigeants des superpuissances et ceux qui bénéficient de ce colonialisme moderne ne nous considèrent pas comme leurs égaux. Ils ont créé un narratif pour normaliser le génocide. Ils ont une théologie pour cela. Qu’un génocide ait été normalisé est bien le pire des racismes.

Interview de Munther Isaac, par le président des Amis de Sabeel France, le 20 mars 2024

Comment est la vie au quotidien ?

Bethléem est actuellement assiégée et notre accès à Jérusalem a été coupé. Nous hésitons à quitter la ville par peur de la violence des colons, aggravée par les restrictions renforcées aux points de contrôle. Le déclin du tourisme a entraîné une perte de revenus pour de nombreuses familles. Même si ces défis sont importants, il est crucial de maintenir notre attention sur Gaza, où se déroule une crise humanitaire. La situation là-bas exige toute notre attention, car elle représente une crise plus grave, soulignant la nécessité d’efforts concertés pour résoudre les difficultés persistantes à Bethléem et à Gaza.

Comment les gens se sentent-ils et réagissent-ils face à tout ce qui se passe à Gaza et en Cisjordanie ?

Nous sommes remplis de frustration et de colère face à la durée prolongée de cette guerre. Il existe une crainte omniprésente que le même sort puisse arriver à Bethléem. Un sentiment de désespoir persiste parmi ceux qui ont choisi de partir, mais un puissant esprit de résilience prévaut parmi ceux qui reconnaissent que la défaite n’est pas une option. Malgré les défis, un effort collectif est en cours pour se rassembler et se soutenir mutuellement, notamment sur le plan économique, notamment en Cisjordanie.

Qu’en est-il dans les camps de réfugiés à Bethléem et aux alentours ?

Il y a des incursions presque quotidiennes de Tsahal dans les camps. De nombreux jeunes hommes et femmes ont été tués dans ces camps de réfugiés. Plus l'espoir dans une solution pacifique diminue, plus les jeunes hommes optent pour la résistance armée. Les camps de réfugiés ne sont plus sûrs. Désormais, il est impossible de séparer les deux entités, car elles font désormais partie intégrante de la municipalité de Bethléem. Dans les écoles luthériennes, de nombreux élèves sont des réfugiés et ils sont traités avec le même respect et la même égalité que tout autre élève. La principale distinction entre les réfugiés et les résidents de Bethléem réside dans leur engagement inébranlable en faveur du droit au retour.

Est-il encore possible de se déplacer ?

Actuellement, franchir les points de contrôle est devenu de plus en plus difficile en raison des restrictions renforcées, des retards fréquents et des fermetures occasionnelles inopinées. Pour ajouter aux difficultés, du 7 octobre à la mi-février, la principale route reliant Bethléem à Jérusalem et Hébron était totalement fermée aux voitures. Même si le passage est théoriquement possible, il est loin d’être garanti. Malheureusement, la majorité des Palestiniens, moi y compris, se sont vu refuser l’autorisation de se rendre à Jérusalem pour travailler ou prier pendant cette période.

Comment réagissent les membres de la paroisse ?

Nous sommes profondément troublés, attristés, en colère et affligés. Plusieurs membres de notre paroisse de Beit Sahour ont des liens familiaux étroits à Gaza, ce qui renforce leurs inquiétudes. Ils vivent dans une peur constante depuis cinq mois, s'inquiétant du bien-être de leurs proches à Gaza. Tragiquement, une famille a perdu trois membres, dont un a succombé au manque de médicaments actuellement disponibles à Gaza. L’impact n’est pas seulement physique mais aussi spirituel et psychologique, aggravé par les pertes d’emplois dues au déclin du tourisme. Beaucoup se sentent abandonnés et la nature prolongée du génocide en cours intensifie un sentiment démoralisant. Cela ajoute à la détresse que le monde, apparemment indifférent, ne reconnaisse pas les Palestiniens comme égaux, perpétuant ainsi un sentiment d’inégalité et d’injustice.

Vague de prière pour le jeudi 4 avril 2024

La vague de prière de cette semaine sera uniquement constituée de prières pour Pâques, fête que l'Église d’Occident a célébrée dimanche dernier. Ces prières faisaient partie de la Vigile Pascale du Samedi Saint, 30 mars cette année, célébrée sur internet et au cours de laquelle elles ont été dites par divers partenaires de Sabeel : le Collège Biblique de Bethléem (Bethlehem Bible College), Christ au Checkpoint, Églises pour la paix au Moyen-Orient (Churches for Middle East Peace), Chemin de liberté (Freedom Road), Pèlerinages pour un cessez-le-feu à Gaza (Gaza Ceasefire Pilgrimages), Immersion totale (Global Immersion), Kairos Palestine, Réseau évangélique pour le Moyen-Orient (Network of Evangelicals for the Middle East), Chrétiens des lettres rouges (Red Letter Christians) et Telos. Le sermon était donné par le Révérend Munther Isaac, de Bethléem.

  • Dieu de lumière, nous savons que l’oppression est fondée sur la tromperie et que la sainte justice est centrée sur la vérité. Dévoile les mensonges pervers dont se servent bien des systèmes, des gouvernements, des idéologies et des théologies, et qui provoquent tant de souffrances. Bénis les journalistes et les défenseurs de Gaza qui exposent au monde les crimes cachés et manifestes qui y sont commis. Hosanna au plus haut des cieux pour Christ qui est entré à Jérusalem non pas sur un étalon blanc mais sur un âne. Sauve-nous de notre incrédulité et délivre ceux qui sont opprimés par les Pharaons et les Pilate des temps modernes. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

  • Dieu de Marie, nous comprenons les larmes que tu as versées sur ton Fils à travers celles des mères palestiniennes qui pleurent leurs enfants martyrisés. Seigneur, si nous sommes témoins de la crucifixion de Gaza, aide-nous à être comme Marie-Madeleine qui n'a pas laissé la douleur et le chagrin la rendre insensible aux souffrances du Christ. Seigneur, donne-nous le courage de témoigner à travers nos actions et nos paroles, et si c'est nous qui crucifions, mène-nous à la repentance et à la confession publique de nos fautes. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

  • Ô Messie crucifié, nous voyons comment tu as été torturé, moqué, battu, dépouillé et tué sur la croix. Ton cri « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? » (Matthieu 27.46) est une question que nous posons depuis plus de 75 ans, et maintenant plus que jamais. Seigneur, nous te sommes reconnaissants de t'identifier à nous puisque Tu étais « méprisé, laissé de côté par les hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, tel celui devant qui l’on cache son visage ; oui, méprisé, nous ne t’estimions nullement » (cf. Ésaïe 53.3). Nous attendons le jour de ton retour. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

  • Dieu de la résurrection, même si nous sommes désespérés et avons l’impression d’en être pour toujours au Samedi Saint, le tombeau est vide. Nous proclamons ta victoire sur la mort en continuant à résister envers et contre tout, en nous souvenant de Tes paroles : « Soyez sans crainte » (Matthieu 28.10). Ta résurrection est une bonne nouvelle pour les opprimés puisqu'elle est une proclamation de victoire sur le péché et une libération. Aide-nous, Seigneur, à participer à ta nouvelle création en travaillant pour la justice, la libération et la paix en Palestine. El-Messiah Qam ! Haqan Qam : Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité.