Checkpoints
et Machsom Watch
Sur l’ensemble
du territoire palestinien occupé, les checkpoints contrôlent et étouffent la
vie des Palestiniens. Machsom Watch enregistre les injustices commises à
ces checkpoints et en rend compte, afin que le monde entier connaisse leurs
conséquences sur la vie de tous les Palestiniens. Voici ce qu’il vous faut
savoir sur ces checkpoints et ce que vous pouvez faire pour que nous puissions
réagir ensemble et faire la lumière sur cette interminable injustice.
Organisation
Machsom est le terme
hébreu pour ‘checkpoint’, poste de contrôle. Machsom Watch est une
organisation militante de femmes israéliennes originaires de tous les secteurs
de la société et militant pour la paix. Ce qui les motive ? : « Nous
nous opposons à l’occupation israélienne de la zone connue sous le nom de
Cisjordanie. Nous nous opposons à l’appropriation de terres palestiniennes et à
la négation des droits humains des Palestiniens. Nous soutenons le droit des
Palestiniens à se déplacer librement sur leur territoire, et nous nous opposons
pour cela aux checkpoints qui entravent gravement leur vie quotidienne...
Depuis 2001,
nous sommes témoins de l’occupation militaire israélienne et nous la dénonçons.
Tous les jours, nous suivons de près ce qui se passe aux checkpoints de
Cisjordanie, aux clôtures de séparation, aux barrières agricoles, dans les
tribunaux militaires, et dans les villages palestiniens. Nous enregistrons ce
que nous voyons et ce qui nous est communiqué par les Palestiniens eux-mêmes…
Par nos
observations, nos rapports, nos films, nos photos et nos visites, nous voulons
influencer l’opinion publique en Israël et ailleurs dans le monde, en rendant
compte des conditions de vie invraisemblables auxquelles sont soumis les
Palestiniens sous occupation israélienne, et en en donnant des preuves. Ce sont
des conditions de vie qui corrodent aussi le tissu de la société israélienne, et les valeurs même de la
démocratie. Nous nous efforçons aussi de soulager les frustrations et les
souffrances des Palestiniens en leur proposant une réelle assistance toutes les
fois que nous le pouvons. »
En plus de ‘l’Action Kumi’ proposée ci-dessous, nous vous invitons à
consulter les rapports de Machsom Watch indiqués ci-dessous dans les
‘Ressources’ et de repérer les violations des droits humains qui y sont signalées.
Parlez autour de vous de l’importance et de la manière de protester contre de
telles violations.
Nous encourageons chacun à découvrir la réalité des checkpoints, surtout
si vous visitez Israël et la Palestine. Vous pouvez aussi vous joindre à l’une
de nos propres visites aux checkpoints, que nous signalons sur notre site web
et sur Facebook.
Enfin, nous vous invitons à consulter
nos rapports en anglais qui paraissent su notre site web. Nous publions aussi
quelquefois des rapports en anglais sur notre page Facebook, et nous vous
incitons à nous suivre et diffuser nos rapports. Il arrive que la presse publie
des articles sur les checkpoints. Nous vous encourageons à écrire à l’ambassadeur
de votre pays en poste en Israël pour qu’il proteste contre la pratique de ces
checkpoints. Vous pouvez aussi lui écrire à propos des attaques permanentes
contre les organisations de défense des droits humains en Israël et lui faire
savoir que vous soutenez l’action de ces groupes.
Vous trouverez Machsom Watch (en
anglais) sur son site web https://machsomwatch.org/he/content/home-page ou sur Facebook à l’adresse https://www.facebook.com/machsomwatch ou encore sur Twitter à https://twitter.com/machsomwatch.
La
situation
Machsom Watch exerce sa
surveillance des checkpoints et en rend compte depuis 2001. Les checkpoints
limitent sévèrement les droits les plus fondamentaux de liberté de déplacement
des Palestiniens, entre autres leur droit de partir de chez eux et de revenir à
la maison, leur droit de voyager, d’étudier, de participer à des célébrations
religieuses, de travailler, de monter et gérer une entreprise, d’avoir accès aux
soins médicaux, de cultiver un jardin, d’avoir accès à leurs terres agricoles
et à l’eau. Beaucoup de ces checkpoints sont devenus des structures
permanentes, d’autres sont aléatoires. Tous sont conçus pour limiter et contrôler
les déplacements des Palestiniens à l’intérieur des territoires occupés et, en
certains endroits, entre les territoires palestiniens occupés et Israël. Certains
de ces checkpoints sont gérés par des soldats israéliens, mais beaucoup le sont
aujourd’hui par des sociétés de sécurité privées.
Tous les jours,
des dizaines de milliers de Palestiniens traversent ces checkpoints. À l’aube,
les plus grands sont envahis de monde, la traversée en est lente et très
contrôlée et force les gens à attendre en file pendant de longues heures avant
d’avoir accès aux moyens de transport côté israélien. Pour pouvoir passer, il
faut un permis accordé par l’administration militaire israélienne, que ce soit pour
l’emploi, pour des raisons médicales, pour les études ou toute autre raison. De
plus, dans quelques 25 villages du centre de la Cisjordanie, les Palestiniens
sont obligés de passer par des barrières agricoles pour pouvoir accéder à leurs
champs qui se trouvent de l’autre côté de la « barrière de sécurité ».
Les difficultés pour obtenir ces permis ou l’attribution du permis à un seul
membre de la famille seulement ont amené beaucoup de Palestiniens à cesser de
cultiver leurs terres, qui ont alors été confisquées par les autorités
israéliennes.
Bien que la
présence des checkpoints et le besoin de permis pour se déplacer entre Israël -
Jérusalem y compris !- et les territoires palestiniens occupés soient
devenus des éléments courants du quotidien des
Palestiniens, ils les font vivre avec un sentiment permanent d’incertitude, car
ils ne savent jamais si eux-mêmes ou les membres de leur famille pourront vraiment
arriver à destination ou revenir chez eux. Souvent il leur est interdit de
franchir les checkpoints parce qu’on leur dit soudain que leur permis n’est
plus valide du fait qu’ils ont été inscrits par les Services de sécurité
israéliens sur une liste noire pour de prétendues « raisons de sécurité »,
ou par la police pour des raisons aussi banales que d’avoir eu une
contravention pour excès de vitesse. Les raisons de l’inscription sur une liste
noire et les moyens de contester une telle inscription ne sont jamais
communiquées aux Palestiniens.
« Au cours
de toutes ces années, nous avons observé et rendu compte de ce qui se passe
dans les tribunaux militaires israéliens où les Palestiniens sont jugés pour
toutes sortes de prétendues atteintes à la sécurité, comme de s’être trouvés en
Israël sans permis, ou encore appartenir à une « organisation hostile »,
ou être en possession d’armes, ou d’avoir l’intention de tuer des
Israéliens ! Nous assistons à ces audiences et en rendons régulièrement
compte, comme témoins civils israéliens dans un système judiciaire profondément
vicié qui ne juge que des Palestiniens de Cisjordanie et de la Bande de Gaza et
qui viole constamment les principes mêmes de la démocratie. Si nous
n’assistions pas à ces audiences et si nous n’en rendions pas compte, personne
ne saurait rien de l’existence de ces tribunaux militaires et des Palestiniens
qui y sont jugés. Nous pensons que chaque personne mérite un jugement
démocratique et équitable, mais cela n’est pas possible dans les tribunaux
militaires » disent les femmes de Machsom
Watch.
Un
cas parmi beaucoup d’autres : Jamal Hanina, berger
Tout Palestinien
des Territoires occupés est concerné par les checkpoints en particulier et par
l’occupation israélienne en général, et nos récits sur ces personnes
proviennent de gens que nous rencontrons aux checkpoints, dans les tribunaux
militaires et en d’autres lieux des Territoires occupés. Le récit qui suit
n’est que l’un des milliers de cas absurdes, frustrants et révoltants de ce que
vivent les Palestiniens que nous, femmes de Machsom
Watch, avons pu rencontrer.
À l’un des
checkpoints qui séparent les Palestiniens de leurs terres agricoles situées
dans la ‟zone de bordure”, entre la « barrière de sécurité » et la « Ligne
verte » [la ligne d’armistice après la guerre de 1948 qui est en principe
la « frontière » d’Israël], un berger palestinien du nom de Jamal
Hanina, dont le hangar qui sert de bergerie à son troupeau se trouve du côté israélien de la « barrière de
séparation », est allé faire paître ses moutons sur ses terres qui se
trouvent du côté palestinien de la « barrière
de séparation ». Il traversa donc le checkpoint agricole de Habla, comme
il le faisait régulièrement depuis treize ans, tout en laissant vingt agneaux
dans la bergerie, construite sur ses terres à lui mais terres qui avaient le
malheur de se trouver du mauvais côté de la clôture : du côté israélien.
Lorsque Jamal
voulut ramener ses brebis à la bergerie pour qu’elles puissent allaiter leurs
agneaux, son troupeau ne fut plus autorisé à traverser. Les Forces israéliennes
d’occupation invoquaient des « raisons de sécurité » pour lui
interdire de ramener son troupeau sur ses propres terres qui, comme dit,
avaient le malheur de se trouver du côté israélien
de la clôture. Du coup, le berger fut obligé d’acheter du lait en poudre chez
un vétérinaire, de préparer le breuvage et d’en nourrir les agneaux avec des
tétines en plastique.
Une semaine
après cet incident, la journaliste israélienne Amira Hass a publié un article
sur ce cas dans le journal israélien Haaretz
: https://www.haaretz.com/opinion/.premium-like-sheep-to-the-separation-1.5428319. En fin de
compte, Jamal Hanina put à nouveau réunir brebis et agneaux, mais du côté
palestinien de la barrière. Mais depuis lors, et cela fait bien plus d’un an,
il n’a pas été autorisé à traverser le checkpoint agricole avec son troupeau
pour l’emmener paître dans une terre qui lui appartient, mais est située du mauvais côté de la barrière.
Action
suggérée
À chaque fois
que vous passez par une porte ou que vous traversez la rue, marquez un arrêt
d’une minute pour essayer de mieux comprendre ce que c’est que de n’être pas
libre de ses mouvements, comme c’est le cas pour beaucoup de Palestiniens. Si
vous êtes avec quelqu’un, dites-lui le ‟pourquoi” de votre arrêt : les
checkpoints empêchent beaucoup de Palestiniens de se déplacer librement. Mentionnez-le
sur les médias sociaux, avec une image des checkpoints militaires israéliens et
un lien vers le site web de Kumi Now et le hashtag #HumanRights/droits humains,
#KumiNow, et #Kumi13.
Un
texte, extrait de « Une terre sans frontières : Mon périple autour de
Jérusalem-Est et de la Cisjordanie », de Nir Baram.
« Le soir
est considéré comme le moment du jour où le trafic à travers le checkpoint de Kalandia
est le plus faible. Le grand rush a lieu le matin, lorsque les Palestiniens qui
travaillent à Jérusalem doivent y passer. Nous nous mettons sous un abri où se
pressent déjà des douzaines d’hommes et de femmes. L’atmosphère est calme et
tendue. Presque personne ne parle. Le chauffeur de taxi qui nous a amenés là
est un Palestinien « résident israélien », qui a une carte d’identité
bleue. Il, nous dit qu’il a passé toute sa vie à Jérusalem-Ouest, mais que
maintenant il n’a plus de permis de passage et n’a pas vu sa ville depuis
quatre ans. « Au checkpoint, vous êtes toujours obsédé par quelque chose,
dit-il : Vous laisseront-ils passer ? ou y aura-t-il des problèmes ? C’est
l’humiliation, l’incertitude. Vous n’avez aucune maîtrise sur votre
quotidien. »
Nous sommes dans
une file d’attente devant un tourniquet métallique. De temps en temps, nous
entendons un bip sonore et trois personnes peuvent passer par le tourniquet qui
se bloque tout de suite derrière elles. Les trois qui sont passés se trouvent
alors dans une sorte de zone d’attente, puis passent un par un devant une
fenêtre et présentent leur carte d’identité. Si leurs papiers sont en ordre,
ils doivent retirer leur veste, leur ceinture et quelquefois aussi leurs
chaussures, et les faire passer avec leurs sacs devant un scanner. Si un autre
bip se fait entendre et qu’une lampe rouge s’allume, ils doivent aussi enlever
leur chemise et la mettre dans la machine. Cela prend juste quelques minutes pour
que trois personnes puissent passer, mais si les soldats trouvent qu’il y a un
problème avec les papiers, cela peut bien prendre quinze minutes. Il s’est
passé une heure entre temps et nous voilà tout près de la barrière, avec une
file de quelque quatre-vingts personnes derrière nous. Le matin ils peuvent être
un millier… »
Nir Baram est journaliste
israélien, rédacteur et auteur « de la nouvelle génération ». Un de
ses livres a été traduit en français, mais pas celui-là.
Ressources
(en anglais)
Pour en savoir plus sur les checkpoints, consultez les
rapports de Machsom Watch, en anglais : https://machsomwatch.org/en/daily-reports/checkpoints
Vous pouvez aussi regarder nos vidéos, dont beaucoup ont été
tournées à des checkpoints : https://www.youtube.com/user/machsomwatchvid.
Le site de l’agence des Nations Unies pour la Coordination des
affaires humanitaires dans les Territoires palestiniens occupés (OCHA) propose
une très bonne carte avec des détails sur les différentes catégories de
checkpoints : https://www.ochaopt.org/content/west-bank-access-restrictions-january-2017
Si vous voulez en savoir davantage sur les compagnies privées
de sécurité qui gèrent beaucoup de checkpoints, consultez le rapport 2016
“Private Security Companies and the Israeli Occupation,” de Who Profits, à qui
Machsom Watch a fourni des chiffres et d’autres informations. https://whoprofits.org/wp-content/uploads/2018/06/old/private_security_companies_final_for_web.pdf
Vidéos
Channel One
News (Israel): “Checkpoint 300 Between Jerusalem and Bethlehem,” 2014 https://youtu.be/qyv0TMfayBA
“Women, War
and Peace: MachsomWatch”: https://www.pbs.org/video/women-war-and-peace-machsom-watch/ , 2011.
Traduit par Les Amis de Sabeel France
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