Le Musée d’Histoire
naturelle de Palestine
et les effets de l’Occupation sur l’Environnement
Si
l’occupation israélienne fait constamment peser sur le peuple palestinien menaces
et agressions, elle en fait subir de semblables à l’environnement qui est le
sien et dont il dépend. Le Musée d’Histoire naturelle de Palestine et l’Institut de Biodiversité et
de Développement durable de Palestine connaissent bien les liens entre ces abus
et s'efforcent d'en analyser les effets pour mieux s'y opposer. Voici ce qu’il vous faut savoir et ce que vous pouvez faire pour
que nous puissions réagir et nous lever (Kumi !) ensemble.
Organisation
Le Musée d’Histoire naturelle de Palestine (PMNH) et l’Institut de
Biodiversité et de Développement durable de Palestine (PIBS) travaillent pour
mieux connaître, faire connaître et préserver notre environnement, notre
culture et notre patrimoine, et promouvoir ainsi des comportements responsables
à leur égard.
Nos objectifs sont :
·
L’exploration et l’étude de la diversité de la faune,
de la flore et de l’ethnographie humaine par le moyen de collections et par la
recherche.
·
La promotion de la protection de l’environnement et d'un
comportement responsable à son égard.
·
Le recours aux connaissances acquises et aux livres,
aux bases de données et aux collections pour encourager la formation
scientifique.
·
Cataloguer et établir une base de données matérielle
et électronique de toutes les espèces d’animaux et de plantes présentes.
·
Développer le respect a) de nous-mêmes (auto-responsabilisation),
b) de nos semblables (sans tenir compte de leurs origines), c) de tous les
êtres vivants présents sur cette terre que nous partageons tous.
Vous pouvez trouver le Musée d’Histoire naturelle de Palestine et l’Institut
de Biodiversité et de Développement durable de Palestine (en anglais)
sur leur site web https://www.palestinenature.org
ou sur Twitter à https://twitter.com/PalMNH ou Facebook https://www.facebook.com/Palestine-Museum-of-Natural-History-1454309858180882/
Le professeur Mazin Qumsiyeh, fondateur du Musée
d’Histoire naturelle de Palestine et de l’Institut
de Biodiversité et de Développement durable de Palestine, a un blog à l'adresse suivante : http://popular-resistance.blogspot.co.il/ et
alimente Qumsiyeh : A Human Rights Web
(Qumsiyeh : un réseau pour les droits humains) sur http://qumsiyeh.org/home/.
Vous pouvez aussi le trouver sur Twitter à https://twitter.com/mazinq ou sur Facebook
à https://www.facebook.com/mazin.qumsiyeh.9.
La situation
À la fin du XIXe siècle, la Palestine avait quelque 1 300 villages et
villes autochtones, remontant pour la plupart à des milliers d’années et vivant
en harmonie avec la nature. Cette situation a radicalement changé après le
premier Congrès sioniste de 1897, quand des Juifs venus majoritairement d’Europe
se sont emparés de la terre. La destruction de l’ancienne façon de vivre s’est
accompagnée de la destruction de plus de 500 villages et villes ainsi que de
leurs terres sur lesquelles ont surtout été replantés des pins d’Europe qui ont
dégradé l’environnement local. Lorsque la Cisjordanie et la Bande de Gaza se sont
retrouvées sous autorité israélienne en 1967, il y eut encore plus de
destructions avec la construction des colonies de peuplement israéliennes dans
les territoires palestiniens occupés. 800 000 Israéliens y habitent aujourd'hui.
L’environnement naturel palestinien a été traumatisé par le déracinement d’essences
locales d'arbres, la construction de colonies et du mur d'apartheid, les
activités militaires et les zones industrielles, ainsi que par la mise en œuvre
de projets hydrauliques qui détournent les eaux de la vallée du Jourdain et puisent
dans les nappes aquifères souterraines. « C’est un paradoxe sioniste, dit Alon
Tal, le fondateur de l’Union israélienne pour la Défense de l’environnement : Nous
sommes venus ici pour sauver une terre et nous avons fini par la
polluer ».
Des projets pharaoniques et la destruction des habitats indigènes
Les premiers « pionniers » sionistes venus dans la première
moitié du XXe siècle ont détruit quantité d'essences locales d’arbres
(figuiers, amandiers, oliviers…), avec un pic en 1948-1949 dans ce que l’on a
appelé une « Nakba »
(catastrophe) environnementale. On a planté des pins importés d'Europe sur les
emplacements des villages détruits, créant ainsi une monoculture. L’impact sur
le paysage et sur la biodiversité a été désastreux. Ces arbres étaient aussi
sujets à de fréquents incendies. Dans les années 1950, l’État d’Israël naissant
a également détruit les zones humides de la Houla (Hula Wetlands), un site
majeur pour les migrations d’oiseaux et une zone où prospéraient beaucoup
d’éléments locaux de la faune et de la flore. Des centaines d’espèces ont alors
disparu. En outre, les planificateurs israéliens ont, pour des raisons
politiques, détourné vers les régions côtières les eaux des sources du bassin supérieur
du Jourdain. Cela a entraîné la destruction de la vallée du Jourdain et
l’assèchement de la Mer Morte, avec d’importants impacts négatifs sur
l'environnement. Pour encore aggraver les choses, les planificateurs israéliens
travaillent actuellement avec la Jordanie à la réalisation d’un canal allant de
la Mer Rouge à la Mer Morte et qui va détruire le Wadi Araba et les zones de
récifs coralliens de la Mer Rouge.
Les colonies
Chaque élément de l’infrastructure coloniale s’est accompagné d’impacts
importants sur l’environnement. Les colonies résidentielles sont en général construites
au sommet des collines avec peu ou pas d'égard du tout pour leur impact sur
l’environnement, et sans prendre en compte les ordures et déchets qu'elles
génèrent. Des infrastructures spéciales sont construites pour relier les
colonies entre elles, produisant une redondance d'infrastructures : des routes
dégradées pour les Palestiniens et de larges autoroutes pour les Israéliens.
Les colonies industrielles rejettent leurs déchets toxiques et polluent
l'atmosphère à proximité des communautés palestiniennes qui subsistent. À la
zone industrielle de Barqan, l'on trouve des usines qui travaillent l’aluminium,
la fibre de verre, les plastiques et d’autres activités qui produisent quantité
de polluants. Le Rapporteur spécial a relevé que « les eaux industrielles usées
qui s’écoulent sans traitement dans la vallée voisine endommagent les terres
agricoles des villages palestiniens voisins de Sarta, Kafr al-Dik et Burqin, et
polluent les eaux souterraines avec des métaux lourds ». Et il
y a au moins six autres zones industrielles. Par ailleurs, l'obligation faite
aux Palestiniens de prendre des routes, différentes de celles des Israéliens, qui
contournent les colonies et les murs est source de pertes de temps, augmente
les émissions polluantes des véhicules et a des effets pernicieux sur la santé.
Avec les colonies, c'est aussi la violence des colons qui est introduite. C'est
elle qui a déraciné et brûlé des milliers d’arbres, des oliviers surtout, alors
que les Palestiniens ont besoin d'eux pour vivre.
Le Mur de l’Apartheid
La construction du mur de l’apartheid a fracturé et fragmenté à la fois l’environnement
humain et l’environnement naturel. Il sépare les gens de leurs terres et de
leurs ressources en eau, détruit les écosystèmes et réduit les zones de pâturages,
les terrains de chasse et les zones de passage des migrateurs.
En faisant pénétrer le mur profondément en Cisjordanie, Israël s’est emparé
de terres comportant d’abondantes ressources en eau, de la plupart des terres
agricoles fertiles et d'une grande partie de la zone forestière dans un environnement
par ailleurs aride. Cela a créé des conditions invivables dans les zones
palestiniennes restantes et a provoqué de gros problèmes environnementaux, par
exemple la fragmentation des habitats de la faune sauvage. La seule préparation
du terrain pour la construction du mur a entraîné le déracinement de 1,5
million d’arbres fruitiers.
L’impact de l’armée
L’impact de l’armée israélienne sur l’environnement se traduit par des
restrictions d’accès à de vastes secteurs, l'usage de munitions réelles lors
d'exercices, et le rejet dans la nature de déchets toxiques, y compris chimiques
et nucléaires. En accaparant de larges secteurs de la Cisjordanie pour des
installations militaires et des terrains d'exercices, l’armée a aussi obligé
les éleveurs palestiniens à surpâturer les quelques terres qui leur restent. Ce
surpâturage a rétréci la couverture végétale, ce qui a entraîné l’érosion des
sols et mène directement à la désertification.
L’emploi de l’eau
L’utilisation de l’eau par les Palestiniens en Israël est régie depuis 1948
par le droit israélien et les impératifs militaires, et il en a été de même
après 1967 pour la Cisjordanie et Gaza. Actuellement, 91% de l’eau des
territoires occupés est accaparée illégalement, au regard du droit
international, par Israël. Il en résulte que les Palestiniens qui sont restés,
c'est-à-dire ceux qui ne sont pas devenus des réfugiés ailleurs dans le monde, en
sont réduits à utiliser moins d’eau que ce que l’Organisation mondiale de la
Santé préconise pour vivre sainement.
Élimination des déchets
En plus des déchets et des eaux de ruissellements provenant des colonies
israéliennes, des zones industrielles et des installations militaires, Israël achemine
dans les territoires occupés des déchets provenant d’autres secteurs du pays.
Par exemple, des déchets solides produits par Jérusalem-Ouest sont rejetés dans
une décharge insalubre près d’Abu Dis. Et selon l’Institut de Biodiversité et
de Développement durable de Palestine, « en 2005, le nombre de décharges
de déchets solides non contrôlées est passé de 89 à 161 en Cisjordanie, et aucune
d’entre elles n’est l’objet d’une quelconque surveillance ou d’un quelconque contrôle
par le ministère palestinien de la Santé ou toute autre autorité ».
Gaza
Les Nations Unies ont déclaré que Gaza sera invivable en 2020. Quelque deux
millions de personnes, dont deux tiers de réfugiés et plus d’un million
d’enfants, sont entassés dans une prison semi-aride à ciel ouvert sous blocus israélien
et sont privées des droits que leur reconnaît la communauté internationale : accès
à l’eau, liberté de mouvement, la plupart des importations et des exportations.
C’est dévastateur au point de vue environnement et un génocide lent au point de
vue humain.
Ceci n’est qu’un aperçu succinct de la façon dont l’occupation, sous ses
nombreux aspects, a des effets négatifs à la fois sur l’environnement et sur la
population indigène globalement. La situation est clairement insoutenable et la
question qui surgit est celle-ci : Que faut-il faire ?
L’histoire de Raja Shehadeh
« La dernière partie du chemin par lequel je pouvais descendre dans la
vallée était étroite et envahie de buissons épineux. Je m’y frayais un passage,
m’égratignant la peau, jusqu’à ce que le chemin tournât à droite. Les côtés
s’écartaient. Je poursuivais par le chemin dégagé parallèle à la vallée.
J’étais caressé par la douce brise qui traversait cette zone verte. Sur ma
gauche s’étendaient de hautes herbes et des oliviers luxuriants dans un sol
riche et profond. Je continuais, traversant le creux entre les deux collines
suivantes. La vallée s’étalait ici dans toute sa largeur. Évoluant entre les
terrasses, des troupeaux de moutons parcouraient les pentes des collines comme
de pâles rubans jaunes. Je cherchais le berger et le vis s’apprêtant à jouer de
sa flûte. Je m’arrêtai et m’assis un moment sur un rocher pour écouter ses
mélodies pastorales. Puis je repris ma marche, m’efforçant de me déplacer aussi
discrètement que possible.
J’atteignis bientôt cette partie du wadi
qui nous inspirait toujours quand j'y venais avec Jonathan Kuttab, mon collègue
en droits humains à Al Haq en 1981. Loin de la ville, près du ruisseau à sec entre
les collines, nous avions l'habitude de nous asseoir sur le rocher, les pieds dans
l’herbe… Nous parlions de ce qui s’étendait devant nous. Nous avions lu l’un et
l’autre le plan directeur de colonisation établi par le Conseil régional juif
de Cisjordanie en collaboration avec le Département des colonies de
l’Organisation sioniste mondiale. Selon ce plan, 80 000 Juifs israéliens devaient
être installés sur nos collines en 1986, dans vingt-cinq colonies et vingt
avant-postes. Deux milliards de dollars allaient être alloués pour en assurer
la réalisation. Des tonnes de béton allaient être répandues sur ces collines.
Le plan prévoyait la construction de routes au rythme de 150 kilomètres par an.
Chaque année 500 dunums (un dunum égale 1000 mètres carrés) de zones
industrielles allaient être créés…
Le plan considérait notre présence ici comme une contrainte et avait le
souci d'empêcher notre « indésirable développement ». Par la création
de nouvelles implantations humaines là où n’en existait aucune, en les reliant
par des routes et en isolant celles qui existaient déjà, il n’allait pas se
contenter d’étrangler nos communautés mais allait aussi détruire cette terre magnifique
et changer en l'espace de quelques années ce qui avait été préservé des siècles
durant ».
Extrait de Promenades palestiniennes : Considérations sur un paysage évanescent,
de Raja Shehadeh
Action
Le Musée d’Histoire Naturelle de Palestine fait un travail remarquable et
mérite votre soutien. Aidez-le en faisant une ou plusieurs des choses
suivantes :
·
Lancer une campagne de financement et envoyer une aide
au musée via https://www.palestinenature.org/donations/.
·
Le Musée d’Histoire Naturelle de Palestine est géographiquement
très proche de destinations touristiques très connues comme la Tombe de Rachel
et l’hôtel Walls-Off de Banksy à Bethléem. Mais il reçoit beaucoup moins de
visiteurs. Si vous-mêmes ou l’une de vos connaissances venez en visite en
Israël et en particulier à Bethléem, ajoutez le Musée à votre itinéraire :
https://goo.gl/maps/qGyw9wwYSoL2
·
Si vous-même n’envisagez pas une telle visite, vous
pouvez aider d’autres personnes à la faire. Prenez contact avec une agence de
tourisme et informez-la sur le Musée d’Histoire naturelle de Palestine. Vous
pouvez aussi en faire la promotion en ligne sur un site comme TripAdvisor.
Faites part de votre don ou de votre plaidoyer pour le musée sur les médias
sociaux. Joignez un lien à cette page du site web de Kumi Now avec les hashtags #KumiNow et #Kumi33.
Deux textes
« Seul un changement majeur dans le raisonnement moral, avec un plus
grand engagement à l’égard de la vie pourra répondre à ce qui est le plus grand
défi du siècle. Les terres sauvages sont notre lieu de naissance. Nos
civilisations y ont pris naissance. Notre nourriture et la plupart de nos
demeures et de nos véhicules en viennent. Nos dieux y vivaient. La nature dans
les terres sauvages est un droit dès sa naissance pour chaque habitant de cette
terre. Les millions d’espèces auxquelles nous avons permis d’y survivre, mais
que nous continuons à menacer, sont nos parents phylogénétiques. Leur histoire dans
la longue durée est aussi la nôtre. Malgré toutes nos prétentions et toutes nos
fantaisies, nous avons toujours été et resterons toujours une espèce biologique
liée à ce monde biologique particulier. Des millions d’années d’évolution sont
inscrites de façon indélébile dans nos gènes. L’histoire sans les terres
sauvages n’est plus de l’histoire ».
Extrait de
Half-Earth : Our Planet's Fight for Life
(Demie Terre : Le
Combat de notre planète pour la vie), de Edward O. Wilson.
« Tant que nous n’aurons pas le courage de reconnaître la cruauté pour
ce qu’elle est, …nous ne pourrons pas espérer voir les choses aller beaucoup
mieux dans ce monde… Nous ne pourrons pas trouver la paix chez des gens dont le
cœur prend plaisir à tuer toute créature vivante. Par chaque acte qui glorifie
ou même tolère un plaisir à tuer aussi stupide, nous faisons reculer le progrès
de l’humanité ».
Rachel Carson
Ressources (en anglais)
Livres :
·
Popular Resistance in
Palestine: A History of Hope and Empowerment de Mazin Qumsiyeh
·
Sharing the Land of Canaan:
Human Rights and the Israeli-Palestinian Struggle de Mazin Qumsiyeh
Rapports:
·
“The Segregation Wall Impacts on Palestinian Environment” par : Applied Research Institute Jerusalem https://www.arij.org/files/arijadmin/2016/The_Segregation_Wall_impacts_on_Palestinian_Environment.pdf
·
“Status of the Environment in the State of Palestine 2015” par Applied Research Institute – Jerusalem: https://www.arij.org/files/arijadmin/2016/SOER_2015_final.pdf
·
“The Environmental Impact of
Israeli Settlements on the Occupied Palestinian Territories” de Sawsan Ramahi pour
Middle East Monitor:
https://www.middleeastmonitor.com/wp-content/uploads/downloads/factsheets/the-environmental-impact-of-israeli-settlements-on-the-occupied-palestinian-territories.pdf
https://www.middleeastmonitor.com/wp-content/uploads/downloads/factsheets/the-environmental-impact-of-israeli-settlements-on-the-occupied-palestinian-territories.pdf
Articles
·
“Israeli Violations Against the Palestinian
Environment” de Dr. Jad Isaac https://www.fosna.org/files/fosna/CornerstoneIssue45.pdf
·
“The Impact of the Israeli
Occupation on Palestine’s Environment” de Simon Awad
https://www.fosna.org/files/fosna/CornerstoneIssue45.pdf
https://www.fosna.org/files/fosna/CornerstoneIssue45.pdf
·
“’Agricultural Terrorism’:
Palestinian crops face destruction by Israeli settlers” de Yumna Patel pour
Middle East Eye : http://www.middleeasteye.net/news/agricultural-terrorism-palestinian-crops-face-destruction-israeli-settlers-1562802280
Vidéos:
·
Scarred Lands & Wounded
Lives: The Environmental Impacts of War
http://www.scarredlandsfilm.com/watch-feature-film/
http://www.scarredlandsfilm.com/watch-feature-film/
·
“Existence is Resistance:
Occupation and the Environment” de Innovative Minds:
https://youtu.be/EyFAzEvfx8o
https://youtu.be/EyFAzEvfx8o
Traduit par les Amis de Sabeel France
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