« Ils courront et ne se fatigueront
pas »
Déclaration de la Conférence & Appel aux Églises
29 november 2019
Réunis à
Bethléem, lieu de naissance de Jésus, nous sommes plus de 350 participants,
femmes et hommes, jeunes et vieux, laïcs et membres du clergé, Palestiniens et
amis venus du monde entier, et nous en appelons aux Églises à l’occasion du 10ème
anniversaire du document « Un moment de vérité », de Kairos
Palestine.
Depuis le moment où a été lancé le document Un moment de vérité, il y a
10 ans de cela, la vie en Palestine a connu une rapide détérioration à cause de
son occupation illégale par l’État d’Israël. L’oppression est devenue plus
agressive, plus brutale. Nos frères et sœurs assiégés, emprisonnés, à Gaza et
qui se retrouvent dans une atmosphère non-violente pour la Marche du Retour ont
été les cibles d’une réponse sanglante, mortelle. Les colonies ne cessent de
s’étendre. Et tout comme les colonies, les menaces d’annexion de la vallée du
Jourdain grandissent sans la moindre parole des principales puissances pour les
condamner. Nous faisons l’expérience de la dépossession continue de notre
terre, de notre liberté et de nos droits humains.
Ajoutez à cela trois autres événements
consternants : la reconnaissance par les États-Unis de Jérusalem comme
capitale d’Israël, l’annonce par le Secrétaire d’État américain que le
gouvernement des États-Unis ne considère plus les colonies de Cisjordanie comme
étant « incompatibles avec le droit international », et l’adoption
récente par l’État d’Israël de la loi « État-Nation » qui exprime
clairement que la situation de facto d’apartheid est devenue un apartheid de jure : de droit ! L’échec
du processus de paix est une évidence de plus pour nous dire que l’actuel statu quo est intenable.
Alors que nous avons reçu de
l’Église universelle, durant ces dix dernières années, des réponses fortes et
prophétiques – et nous rendons grâce à Dieu pour le développement de
partenariats avec des groupes tant religieux que laïcs, ici dans notre région
et de par le monde-, nous constatons avec tristesse qu’il y a toujours beaucoup
de gens de par le monde qui se servent de la Bible pour justifier l’occupation
et qui soutiennent l’État d’Israël sans se poser la moindre question. La plus
grande partie de l’Église universelle nous trahit.
C’est comme si nous nous tenions sur
le rebord d’une falaise à regarder dans un abîme.
Face à ces défis, nos engagements
tels qu’ils ont été présentés dans Un
moment de vérité n’ont pas bougé, tout comme la prise de position des
dirigeants des Églises de Jérusalem qui a été exprimée par deux fois durant le
processus de paix, en 1994 et en 2006 : « Plusieurs solutions sont
possibles. La ville de Jérusalem pourrait rester unie, mais il faudra dans ce
cas que la souveraineté soit partagée et mise en œuvre par les Israéliens et
les Palestiniens selon un principe d’égalité. » En réponse à des
idéologies et des théologies qui excluent, nous joignons notre voix à celle de
beaucoup d’autres, tant juifs que musulmans, qui souhaitent un monde dans
lequel tous seront traités comme des égaux, dans la conviction que c’est l’unique
garantie pour une paix juste et durable.
C’est pourquoi, comme des veilleurs
au sommet d’une tour, nous faisons retentir à nouveau notre appel et en
appelons à nouveau à votre solidarité, à vos prières intenses et à votre
engagement pour agir. Levez-vous et
prenez la parole, dans votre propre contexte, pour demander avec insistance une
paix juste.
·
Défendez
avec vigueur les droits des Palestiniens et de ceux qui sont solidaires avec
nous dans la résistance à l’occupation, en soutenant aussi toutes les formes
d’une résistance non-violente et créative, y compris le BDS, en vue de mettre
la pression sur Israël afin qu’il mette un terme à l’occupation, et en rejetant
activement toute tentative de qualifier cette résistance d’antisémite.
·
Condamnez
sans ambiguïté toute position théologique qui justifierait les privilèges d’un
peuple par rapport à un autre.
·
Reconnaissez
Israël comme étant, selon le droit international, un État d’apartheid, surtout
par le vote de la loi ‘État-Nation’, en affirmant clairement que personne ne
peut se prévaloir d’un droit exclusif sur quelque terre que ce soit pour des
motifs de religion, de race et/ou d’ethnicité, et que tous les humains ont été
créés à l’image de Dieu et peuvent prétendre à des droits et des traitements
égaux.
·
Prenez
position contre toute forme d’extrémisme religieux et contre toute tentative de
créer un État religieux dans notre région.
·
Exigez
courageusement de vos partenaires d’autres religions qu’ils incluent
l’occupation et les injustices en Palestine-Israël dans tout programme de
dialogue interreligieux.
·
Dégagez des
ressources et menez des campagnes destinées aux dirigeants d’Églises et aux
pèlerins, afin qu’ils visitent Bethléem et les autres communautés de Palestine
en partenariat avec les agences touristiques palestiniennes, pour faire grandir
le nombre de ceux qui pourront témoigner des effets de l’occupation. Contestez
des présentations et des itinéraires unilatéraux tels qu’ils peuvent être
proposés par des agences touristiques israéliennes, souvent en position de
monopole et au service de l’occupation.
·
Prévoyez des
ressources pour inclure et ouvrir des espaces dans lesquels des jeunes et des
jeunes adultes pourront être formés pour constituer une nouvelle génération de
leaders chrétiens palestiniens qui plaideront
et s’engageront pour leur cause et transmettront un message prophétique
de vérité, tel qu’il avait déjà été exprimé dans le message de Kairos
Palestine.
Que votre résistance à l’injustice
où qu’elle soit à l’œuvre, et tout particulièrement de nos jours en
Palestine-Israël, soit courageuse et inspirée par la logique de l’amour !
Sachez que, dix ans après le premier
appel de Kairos Palestine, nous résistons et ne perdons pas courage, nous ne
sommes ni fatigués ni exténués. Fortifiés par l’amour de Dieu pour tous et
rejoints par d’autres dans une même communion de la grâce de Dieu - qui se vit
sur terre comme au ciel -, nous prenons notre essor comme des aigles (Isaïe
40.31). Nous courons et ne nous fatiguons pas. Nous marchons et ne nous
épuisons pas.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire