Réfugiés palestiniens
Département Services
aux Réfugiés, Conseil des Églises du Moyen Orient
Les Palestiniens qui avaient fui leurs foyers ou en
avaient été expulsés en 1948 espéraient pouvoir rapidement revenir dans leurs
maisons et sur leurs terres. Peu d’entre eux auraient pu imaginer que des
décennies plus tard, eux et leurs descendants seraient toujours soit des réfugiés
soit des « déplacés de l’intérieur ». Le Département des Services aux Réfugiés Palestiniens (DSPR)
du Conseil des Églises du Moyen-Orient agit pour redonner espoir aux réfugiés d’alors
et à leurs descendants aujourd’hui. Voici ce qu’il vous faut savoir et ce que
vous pouvez faire pour que nous puissions réagir et nous lever (Kumi !)
ensemble.
Organisation
Le Département des
Services aux Réfugiés Palestiniens s’est constitué comme groupe ad-hoc de
clercs et de laïcs engagés suite à la guerre israélo-arabe de 1948 et à
l’apparition du problème des réfugiés palestiniens. Des groupes
locaux et des comités régionaux se sont alors constitués à Jérusalem et en
Cisjordanie, sur la rive Est du Jourdain en Jordanie, au Liban, à Gaza et en
Galilée et ont accueilli les premières vagues de réfugiés palestiniens. Ils se
sont intégrés au Conseil des Églises du
Moyen Orient lorsque celui-ci a été créé en 1974. Le problème des réfugiés
palestiniens et de leurs droits fondamentaux reste aujourd’hui un problème central
auquel le Département des Services aux
Réfugiés Palestiniens s’efforce de répondre. Son travail se fonde sur l’appel
à servir le pauvre et l’opprimé, donc aussi à aider les réfugiés palestiniens à
vivre dans la dignité et renforcer leurs communautés afin de rendre possible
leur droit au retour.
Le Département
des Services aux Réfugiés Palestiniens vous invite à sensibiliser
votre communauté ecclésiale à la détresse des réfugiés palestiniens qui ont été
obligés de fuir une guerre après l’autre. Écrivez aussi à vos élus pour qu’ils
s’opposent à toute réduction des moyens financiers et humains de l'Office de Secours et de Travaux des Nations Unies
pour les Réfugiés Palestiniens (UNRWA), afin qu’il puisse assurer aux
réfugiés palestiniens les services de santé, d’éducation et d’aide sociale dont
ils ont besoin. Rappelez-leur qu’une solution juste et durable au « conflit
israélo-arabe » ne peut être trouvée tant que n’est pas trouvée aussi une
solution qui garantisse leurs droits aux réfugiés palestiniens.
Si
vous connaissez des réfugiés palestiniens, invitez-les à raconter leur histoire
à votre communauté. Vous trouverez plus d’informations sur le site du Département
des Services aux Réfugiés Palestiniens https://dsprme.org/.
Le problème
En
1948, 726 000 Palestiniens ont été arrachés à leurs foyers du fait de la Nakba (catastrophe, en arabe). En 1950 l’UNRWA a été créé par les Nations
Unies pour assurer les besoins des réfugiés en matière de logement, de santé, d’éducation
et d’aide sociale. La plupart de ces réfugiés étaient abrités dans des structures
provisoires. En 2016 l’UNRWA signalait que plus de 5 millions de réfugiés
palestiniens étaient enregistrés par ses services dans les cinq secteurs
géographiques qu’il gère : la Jordanie, le Liban, la Syrie, la Cisjordanie
et la Bande de Gaza. Il y a 58 camps de réfugiés dans la région : 10 en
Jordanie, 12 au Liban, 9 en Syrie, 19 en Cisjordanie et 8 dans la Bande de
Gaza. 28,4% des réfugiés enregistrés continuent à vivre dans des camps, le plus
fort pourcentage étant au Liban avec 50,6%, suivi de Gaza avec 40,9%.
Lors
des entretiens secrets tenus à Oslo en Norvège, les différentes parties avaient
convenu que la question des réfugiés ainsi que celles de Jérusalem, des
colonies, des dispositions de sécurité et des frontières définitives seraient
discutées lors d’une phase ultérieure des négociations …qui n’a jamais eu lieu.
La question des réfugiés palestiniens reste aussi insurmontable que jamais. Aucune
solution de paix durable entre Israël et les Palestiniens ne peut se trouver
sans leur garantir soit le droit au retour soit un dédommagement.
L’histoire de Salwa Naser, réfugiée palestinienne
Salwa
Naser a quitté sa maison familiale dans le port de Jaffa lorsqu’elle avait six
ans, il y a 68 ans de cela. Deux fois réfugiée entre temps, elle vit
aujourd’hui dans une petite chambre en parpaings jouxtant l’appartement de son
fils dans le camp de réfugiés de Chatila à Beyrouth, camp surpeuplé d’un kilomètre
carré dans les faubourgs sud de la ville. Construit en 1949, il était prévu
pour loger temporairement quelques 3 000 Palestiniens venus au Liban pour
fuir la guerre, mais il abrite aujourd’hui plus de 22 000 personnes :
trois générations de réfugiés palestiniens, et aussi des travailleurs migrants
pauvres venus de toute l’Asie et un nombre croissant de Syriens et d’autres
réfugiés palestiniens venus de Syrie et fuyant une guerre qui fait rage dans ce
pays depuis des années.
« Jaffa est belle, rien ne lui est
comparable, dit Salwa en évoquant sa maison près de la côte, dans le
quartier d’Ajami à Jaffa. Notre maison était tout près de la mer… juste
au bas des marches. Il n’y avait rien entre la mer et nous. Nous jouions au
bord de la mer tous les jours. »
Comme
la violence montait entre les milices sionistes juives et les Palestiniens, son
père, une personnalité importante du port de Jaffa, supplia sa femme de prendre
leurs neuf enfants et de les emmener en bateau à Beyrouth. « Je me souviens quand toute la violence a commencé, raconte
Salwa dans son petit logement d’une seule pièce à Chatila. Je n’avais que six ans lorsque nous sommes partis, mais Jaffa sera
toujours ‘ma’ ville… Encore aujourd’hui, je suis triste quand je pense à mon école…
C’était une bonne école, un beau bâtiment… Même la nourriture était bonne. Et nos
uniformes étaient tellement jolis. Nous avions plusieurs options : soit des
shorts bleus soit une jupe bleue, et une chemise blanche avec une écharpe
blanche. J’ai toujours choisi la jupe. »
Salwa
dit qu’elle et ses camarades d’école dans ce quartier si tranquille de la côte ne
s’étaient pas rendues compte des tensions entre les communautés jusqu’à ce qu’un
matin les
fenêtres de leur classe de CP volent en éclats suite à une explosion. « Mes parents avaient bien fait de
tenir les enfants que nous étions dans l’ignorance de la violence qui couvait, -
comme l’avait aussi fait le corps enseignant. » Mais, après
l’éclatement de cette bombe près de l’école, le père de Salwa a décidé que c’en
était assez, et il a envoyé les enfants dans la famille de leur mère en Syrie.
Elle n’avait plus de famille à Jaffa. Presque toute la famille partit alors au
Liban, et de là en Syrie…
Comme
ils montaient à bord du bateau, la mère de Salwa se mit à pleurer. « Quand nous lui avons demandé ce qui
n’allait pas, elle a répondu : ‘Nous partons… Notre maison va me manquer’.
Elle s’est alors penchée vers mon frère aîné et lui a dit ‘Je ne
suis pas sûre de jamais revoir notre foyer’” Alors qu’on prenait la mer, le bateau
s’est arrêté. La ville était en feu. C’est à ce moment-là que ma mère s’est vraiment
mise à pleurer » dit Salwa. Après que le bateau eut
touché terre à Beyrouth, la famille a poursuivit sa route vers la Syrie
voisine. « Vous allez vous moquer de
moi si je vous dis que nous sommes allés à Bab al-Hara » continua
Salwa, car ce quartier de Damas est le lieu d’une série de la télévision
syrienne bien connue dans tout le monde arabe. À court d’argent et cherchant à
reprendre racine quelque part, la famille passa d’école en école et de quartier
en quartier avant de se réinstaller dans un quartier de la vieille ville. « C’est toujours comme ça cas pour les
Palestiniens que nous sommes : nous nous faisons toujours repousser d’un
endroit à un autre. J’aimerais qu’on nous dise une bonne fois où nous pourrons
vivre. »
À 16
ans, elle a épousé un jeune Palestinien, lui aussi de Jaffa. Le couple a loué
un petit appartement tout à côté du fameux marché du souk al-Hamadiyye, puis
s’est installé à Hajjar al-Aswad, un quartier juste à côté du plus grand camp
de réfugiés palestiniens de Syrie : Yarmouk. « Notre maison n’existe plus. Elle a dû être frappée par un obus
ou une attaque aérienne, qui sait ? » dit Salwa.
Fin
2012, quand le soulèvement en Syrie devenait de plus en plus sanglant et que la
violence s’emparait de toute la ville, elle est partie pour Beyrouth avec son
fils. Peu de temps après leur arrivée à Chatila, un voisin leur a donné la
photo d’un amas de décombres : tout ce qui restait de ce qui avait été
leur maison. « Je pleurais lorsque
nous sommes partis. Ma sœur qui avait décidé de rester m’a demandé : ‘Pourquoi
pleures-tu ?’ Je lui ai répondu : ‘Tu te souviens quand nous sommes
partis de Palestine, et que maman nous a dit que nous partions pour juste une
semaine et que nous allions revenir ensuite ? Je crains que la même chose ne
se répète. » Réfugiée maintenant pour la deuxième fois de sa vie,
Salwa nous dit qu’elle était constamment sous tension dans ce camp grouillant
de Chatila : « J’ai toujours
détesté la violence… Même les disputes me tapent sur les nerfs. Ici, dans le
camp, les gens sont toujours en train de se disputer et de crier… Ce n’est
jamais calme, jamais ! Je suis toujours sur les nerfs. »
« J’ai peur qu’il n’arrive quelque
chose ici. Vivre ici, je n’aime pas. J’aimerais plutôt aller ailleurs. En Suisse
peut-être… J’aimerais bien. Surtout pas en Amérique ! J’ai entendu dire
que la vie était difficile là-bas. La Norvège aussi serait sympathique. J’ai le
passeport de mon père… C’est le seul document que j’aie, il date du mandat
britannique. J’étais trop jeune alors pour avoir quelque document à moi. »
La
sœur de Salwa s’apprête à partir… Son fils a pris un bateau pour l’Europe. Il
est en Allemagne actuellement. Salwa espère que l’un de ses enfants à elle, qui
ont des papiers palestiniens syriens, pourrait obtenir l’asile en Europe. « Ils espèrent tous aller en Allemagne.
Mais tout le monde va là-bas… Je ne sais pas… Quelle sorte de chance avons-nous ?
Nous avons fui une guerre pour en trouver une autre ailleurs,
dit-elle. Où donc sommes-nous sensés
aller ? »
Extrait de ‟Trois réfugiés palestiniens racontent les
histoires de leurs errances, de ce qu’ils ont perdu, et leur espoir de pouvoir
revenir dans leurs villages” par Jonathan Cook, Dylan Collins et Ezz Zanoun.
Publié par Al Jazeera. Le lien http://www.aljazeera.com/news/2016/05/nakba-survivors-share-stories-loss-hope-160517094112558.html permet de lire les histoires des deux autres réfugiés.
Proposition d’action
Cherchez
l’adresse du consulat ou de l’ambassade d’Israël le plus près de chez vous et
organisez une pétition pour demander à la ville où il/elle se trouve de
renommer sa rue « rue de la Palestine libre » …pour attirer
l’attention sur la Palestine et les réfugiés palestiniens. Imaginez l’effet que
cela ferait si l’adresse de chaque consulat israélien et de chaque ambassade
israélienne était « rue de la Palestine libre » !
Vous
pourriez aussi commémorer le jour de la Nakba
le 15 mai en changeant ainsi, avant cette date, le nom de votre entrée ou de
votre rue si c’est une rue privée. Mais il faudra ajouter des informations pour
faire comprendre aux gens la signification de ce jour et son origine.
Prenez
une photo de ce que vous aurez fait et diffusez-la sur les réseaux sociaux,
avec aussi l’adresse du site web de Kumi Now et les hashtags #NakbaDay,
#KumiNow, et #Kumi27.
Un texte : Prière de Bethléem
Oh
mystère aussi vaste que l’univers
Oh force puissante de toute la création
Oh puissance qui surpasse toute notre puissance
Tu es venu à nous comme un enfant.
Vulnérable, fragile, beau.
Tu es venu à nous
en toute pauvreté,
impuissance et attente.
Reviens,
oh Annonciateur de Paix.
Reviens à la ville de ta naissance
embourbée dans la peur, l’oppression et l’injustice.
Reviens où les impacts de balles
marquent encore les murs du sanctuaire.
Reviens où les enfants rêvent
de foyers qu’ils n’ont jamais vus.
Reviens où une simple clef
ou le numéro 194 continuent à crier
le souvenir d’un déplacement forcé jusqu’à Bethléem.
Nais à
nouveau dans les camps.
Nais à nouveau dans des écuries et des foyers.
Nais à nouveau dans bien des villes et bien des langues.
Nais à nouveau au sein des nations.
Nais à nouveau dans des lieux d’injustice.
Nais à nouveau comme promesse d’espoir,
comme signe d’amour et de joie pour le monde.
Nais à nouveau dans nos cœurs
pour que nous aussi puissions être appelés
Artisans de paix
et Enfants de Dieu. Amen.
Par le Très Rév. David Giuliano, trente-neuvième modérateur
de l’Église Unie du Canada.
Notes explicatives :
* Bethléem est aujourd’hui séparée de Jérusalem
par de grands murs et abrite trois camps de réfugiés palestiniens.
* La ‟simple clé” évoque les nombreux
Palestiniens de Bethléem qui possèdent encore la clé de la maison d’où ils ont
dû fuir en 1948.
* Le nombre ‟194” se voit en de nombreux
endroits à Bethléem en référence à la Résolution 194 des Nations Unies qui
accorde aux réfugiés palestiniens le « droit au retour » dans les
villages dont ils sont originaires.
* L’Église de la Nativité est encore criblée d’impacts
des balles israéliennes qui ont mis fin à un siège de 42 jours en 2002 après
que des soldats palestiniens s’y furent réfugiés.
‘United Network for Justice and Peace in Palestine and
Israel’ : Réseau unifié pour la justice et la paix en Palestine et en Israël,
sur http://www.unjppi.org/prayers.html © 2008 Église Unie du Canada.
Ressources en anglais
De l’UNRWA:
Des vidéos:
“Inside Story: Why is the US Withholding Aid for Palestinian Refugees?” de
Al Jazeera English : https://youtu.be/u3wyACZFDEA
“Someone Like Me: Palestinian Refugees in
Syria” de UE au Liban, 1ère partie : https://youtu.be/1evmJOUVWN4
Part 2: https://youtu.be/FsET_4vj3yg
“Life in the Shadows: Palestinians in Lebanon” de Al Jazeera English: https://youtu.be/vnNI869yOfs
“Interviews with Palestinian Refugees in Lebanon” de Zochrot: https://youtu.be/Dhy1N-aSGJY
Un article : “On the 70th anniversary of the Nakba, a look back at
the Palestinian struggle for their right of return” par Mike Merrryman-Lotze et
American Friends Service Community : https://www.afsc.org/blogs/news-and-commentary/70th-anniversary-nakba-look-back-palestinian-struggle-their-right-return
Traduit par les Amis de Sabeel
France
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