Recension du livre de Munther Isaac, traduit par Les Amis de Sabeel France, par Gilbert Charbonnier pour le CPED-Libre Sens

 MUNTHER Isaac

L’AUTRE CÔTÉ DU MUR

Un récit chrétien palestinien de lamentation et d’espoir

Publication originale sous le titre "The Other Side of the Wall"

Traduction : Laurent Baudoin

Éditions Amis de Sabeel-France/Golias, décembre 2023

ISBN : 9 7826959 132506 - 248 pages (210×149×18 mm) – 18,0


Chez les chrétiens palestiniens, la théologie actuelle ne peut être que contextuelle, là où naquit le christianisme, à commencer par le juif Jésus.

Dans les premiers chapitres (1 à 4), beaucoup de questions surgissent. Sur cette terre où, aujourd’hui, plusieurs ethnies revendiquent une place, à qui appartient-elle ?

Peut-on y parler d’une terre promise pour l’État d’Israël moderne ? Peut-on y parler d’une terre sainte dont se réclament trois religions ? Comment ?Qu’en est-il de mon prochain juif ? De mon prochain musulman ? Qu’y signifie la vocation à être artisans de paix, selon les béatitudes de l’Évangile ?En quoi consiste l’espérance, alors que tout espoir a réellement disparu ? Quelle place faire aux souffrances engendrées ?Où est le Christ ? À Bethléem ? À Jérusalem ? Aux checkpoints (postes de contrôle) ? Sous les décombres de la Bande de Gaza ?

Pourquoi cette neutralité silencieuse des institutions chrétiennes occidentales face au « sionisme chrétien » qui affirme que l’État d’Israël contemporain est l’accomplissement des prophéties bibliques, quelle que soit sa politique ? Ce courant de pensée fait une lecture littérale des textes du Premier Testament faisant état du don de la terre à son peuple Israël, tout en taisant les lois sacerdotales du Jubilé (livre du Lévitique, 25) et les textes prophétiques, qui font place à l’étranger, à l’esclave, au pauvre, à la veuve et à l’orphelin dans le pays. Ces convictions se répandent plus ou moins explicitement dans de nombreuses Églises évangéliques à travers le monde. Leurs partisans exercent une influence majeure sur la politique d’États comme les États-Unis d’Amérique. Il est temps de le dénoncer et de le réfuter théologiquement dans la vie ecclésiale. Ce livre fournit les éléments nécessaires pour cette démarche.

Le conflit israélo-palestinien est un exemple des tragiques conséquences de l’usage des références religieuses dans la vie politique et de l’immixtion des convictions spirituelles dans l’exercice du pouvoir, soit que l’idéologie religieuse influence les gouvernants, soit que les détenteurs du pouvoir utilisent à leur convenance les sources religieuses. En Israël-Palestine, les relations s’avèrent dans les deux sens chez les deux parties. Les chrétiens minoritaires ont sans doute à faire entendre la voix de l’indépendance réciproque, ainsi que de la liberté de parole et d’engagement pour chacune. [À cet effet, dans notre pays de France, les autorités ont développé le principe de laïcité.]

Dans les chapitres 5 à 7, l’auteur aborde le problème de la relation à autrui, dans l’environnement social. Dès que l’on se forme une conviction, un cercle symbolique se trace autour de soi. À l’intérieur se trouvent tous ceux qui partagent le même discours, le même engagement, et ils se considèrent prochains les uns des autres. À l’extérieur, il y a ceux qui ont d’autres idées ; ils sont alors les autres, différents sinon adversaires. Il n’y a pas les mêmes relations entre les premiers et avec les seconds. Ainsi, l’exclusion se fait jour, sous différentes formes ; des murs se dressent (les juifs, les musulmans sont de ceux-là). La foi chrétienne et la sagesse humaine appellent au contraire à regarder autrui comme un semblable, un congénère, un frère. Et l’on passe de la relation exclusive (entre les mêmes) à la relation inclusive avec tous (les autres), dans une reconnaissance mutuelle. Notamment, la pensée théologique ou religieuse ne peut être qu’inclusive, dans le respect de la différence, en quête de pardon, de réconciliation, de communion. C’est la voix de la foi, de l’espérance et de l’amour.

Enfin, les derniers chapitres (8 à 10) sont consacrés au chantier des "artisans (constructeurs) de paix". Ils apprennent à porter l’espérance là où il n’y a plus d’espoir, à vivre la souffrance dans la patience et la persévérance, témoins du Royaume de Dieu dont le pardon est le ciment, à l’image de leur Seigneur, le Christ de la Passion et de la Croix, et témoins de la victoire à venir de la résurrection pascale.

CPED-LibreSens RECENSION – 2024.02.05 

Compte-rendu de Gilbert Charbonnier

 

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