Émigration des chrétiens palestiniens hors de Terre sainte
Les chrétiens
palestiniens doivent faire face à des difficultés croissantes liées à
l’occupation par Israël de leurs territoires. Cela a poussé beaucoup d’entre
eux à émigrer, réduisant ainsi la présence chrétienne en Terre sainte. L’Église
évangélique luthérienne en Jordanie et Terre sainte (ELCJHL) s’est engagée à préserver
cette communauté en lui offrant des opportunités d’éducation de grande qualité.
Voici ce qu’il vous faut savoir et ce que vous pouvez entreprendre pour que,
ensemble, nous nous levions (Kumi !).
Organisation
L’ELCJHL est une
communauté chrétienne au service de Dieu. Nous avons six paroisses de langue
arabe : à Ramallah, Jérusalem, Beit Jala, Bethléem, Beit Sahour, et à Amman
en Jordanie. Nous avons également une paroisse commune avec l’Église
luthérienne américaine ELCA, de langue anglaise, à Jérusalem. Nos Églises sont
des lieux importants pour la spiritualité de nos paroissiens qui luttent
souvent pour leur survie sous la longue occupation militaire de la Palestine. Le
culte du dimanche matin, les études bibliques, une académie pour la formation
de prédicateurs laïcs, les groupes de femmes et les groupes de jeunes sont
quelques-uns des ministères vitaux de nos paroisses.
L’ELCJHL croit que la
réponse au défi de l’émigration chrétienne hors de Terre sainte réside dans les
initiatives suivantes :
-
Promouvoir
l’éducation dans le cadre de la communauté, par le moyen d’écoles et d’institutions
éducatives chrétiennes.
-
Contrer
l’émigration des chrétiens en créant pour eux des opportunités de travail.
-
Proposer
des possibilités de logement à bas coût.
-
Fortifier
les institutions sociales chrétiennes, qui proposent leurs services à tous les membres de la société palestiniennes sans
distinction de religion, de sexe ou d’option politique.
Vous trouverez le
site internet de l’ELCJHL sous http://www.elcjhl.org/, ou sur Facebook
sous https://www.facebook.com/elcjhl, sur Twitter sous
https://twitter.com/elcjhl, ou encore sur YouTube sous https://www.youtube.com/user/ELCJHL.
Sujet
Le sujet de
l’émigration constitue un défi important pour les chrétiens de Palestine et des
autres pays du Moyen Orient. Beaucoup de chrétiens quittent leurs lieux de vie
ancestraux suite à de multiples pressions. Des enquêtes récentes auprès de
chrétiens palestiniens ont clairement signalé plusieurs raisons à ce phénomène.
La première raison
donnée par ceux qui ont choisi de partir est le manque global de liberté et de
sécurité dans les territoires palestiniens, ainsi que l’absence de perspectives
de paix. On peut citer plus particulièrement :
-
La
détérioration de la situation économique en Palestine. Les conditions de vie en
Palestine ont fait douter surtout les plus jeunes de la possibilité d’un avenir
économique acceptable.
-
Les
conditions de vie liées à l’occupation, notamment des vécus déshumanisants aux
postes de contrôle, les confiscations de propriétés, les démolitions de
maisons, les refus d’accorder des permis de construire, et le manque de
possibilités de réunification familiale. Tous ces éléments ont créé un climat
de désespoir.
-
Le
développement des extrémismes dans tous les secteurs du conflit a poussé beaucoup
de chrétiens aimant la paix à chercher des lieux plus sûrs pour une vie de
famille.
Toutes les enquêtes
sur les raisons de l’émigration des chrétiens hors de Palestine (manque de
liberté et détérioration des perspectives économiques) montrent qu’elles sont
directement liées aux conditions imposées par l’occupation israélienne. C’est
une tendance lourde et désastreuse pour les membres de nos paroisses
luthériennes.
Néanmoins, si petite
qu’elle soit au point de vue chiffres, notre Eglise a eu une influence
impressionnante sur l’ensemble de la société palestinienne. La présence de
chrétiens arabes et globalement de chrétiens au Moyen Orient est essentielle
pour l’équilibre de toute la région. Nous nous efforçons d’être des faiseurs de
paix et des bâtisseurs de justice, des agents de réconciliation, des défendeurs
des droits humains, de ceux des femmes comme de ceux des hommes, des initiateurs
de dialogue et des apôtres d’amour.
C’est entre autres à
travers nos offres d’éducation que nous avons eu un impact aussi important.
Nous avons des écoles luthériennes à Ramallah, à Bethléem, à Beit Sahour et à
Beit Jala. Nous gérons aussi un Centre d’Éducation à l’Environnement à Beit
Jala. Le témoignage de ces écoles est le même que celui de toute notre Église :
nous sommes connus pour notre modération et notre engagement en faveur de la
paix. Nos élèves sont autant musulmans que chrétiens. Toutes nos écoles sont
ouvertes à tous, et l’éducation à la paix fait partie du programme de chacune
d’entre elles. Beaucoup de ces écoles participent encore à d’autres projets en
faveur de la paix et à des projets proposés par des agences diplomatiques ou
les Nations Unies.
À travers nos écoles,
nous insufflons l’éthique évangélique luthérienne dans l’ensemble de la société
palestinienne :
-
Nous
offrons à nos jeunes une identité palestinienne qui leur permet d’apprécier la
diversité de notre communauté.
-
Nous
apprenons à nos jeunes à vivre avec les adeptes d’autres croyances et tout particulièrement
celles de nos voisins, en insistant surtout sur l’islam, le judaïsme, et le
christianisme.
-
Nous
offrons une éducation à la paix en transmettant à nos enfants les outils pour
une résistance créative et en faveur de la vie face à toutes les puissances de
déshumanisation. Nous encourageons le dialogue en vue de la paix dans la
justice et dans une stratégie de non-violence.
-
Nous
mettons en avant le rôle des femmes dans notre société.
-
Nous
offrons une éducation de qualité en vue de préparer nos élèves à affronter les
nombreux défis de la vie.
-
Nous
voulons ainsi contribuer à l’émergence d’une société civile palestinienne qui
apprécie la diversité et qui encourage la participation démocratique de tous
ses membres à ses projets.
Nos quatre écoles
accueillent aujourd’hui 3000 élèves. Elles sont toutes engagées dans
l’éducation en faveur de la paix.
Récit
Le pasteur Ashraf
Tannous et les luttes des chrétiens en Palestine :
C’est un culte le
dimanche matin comme il y en a beaucoup d’autres, avec des lectures bibliques
et des cantiques accompagnés à l’orgue. Quand est annoncé le chant ‘Comme tu es
grand’, ceux qui le connaissent bien ferment leur recueil de chant et chantent
par cœur. Après le culte, les participants restent pour un café ou un thé dans
la salle adjacente au lieu de culte. Mais nous ne sommes pas aux États-Unis, ni
quelque part en Europe. Nous sommes à l’église évangile luthérienne de Beit
Sahour, en Palestine.
Pour certains, Beit
Sahour est le lieu de naissance du christianisme. Selon la langue d’origine, le
nom de la ville fait allusion soit aux bergers soit aux mages du récit biblique
de Noël. Il y a deux endroits dans la ville dont on dit qu’il y avait là les
champs où les bergers ont vu les anges du Seigneur. La ville de Bethléem se
trouve un petit peu plus à l’ouest.
Vivre comme chrétien
en Terre sainte est une expérience toute spéciale pour le pasteur Ashraf
Tannous, chargé de la paroisse de Beit Sahour. « C’est ici le pays de
Jésus, dit-il, le pays de la Bible. C’est le pays de la naissance, le pays de
la résurrection, le pays de l’ascension, le pays de l’humiliation de Jésus.
C’est le pays de tout ! Il est tout à fait unique. »
Mais vivre dans le
pays de la Bible est aussi lié pour les Palestiniens à toutes sortes de défis :
C’est le pays où le gouvernement israélien confisque les propriétés des
Palestiniens. C’est le pays où les Palestiniens ont besoin d’un permis pour
aller visiter les lieux saints à Jérusalem. C’est un pays où des membres de la
famille du pasteur Tannous ont été chassés de leur maison lors de la guerre de
1948. C’est un pays que les Palestiniens chrétiens comme musulmans quittent
aujourd’hui dans l’espoir de trouver ailleurs une vie plus facile.
Ce qui est encore plus
lourd à porter pour le pasteur Tannous, c’est l’impression que sa famille
chrétienne ailleurs dans le monde ne se préoccupe pas de tout cela.
Car choisir de vivre
en Palestine n’est pas facile. La famille de son père a été chassée de sa
maison à Lydda (Lod en hébreu) en 1948, lors de ce qui est appelé Guerre
d’indépendance en Israël et que les Palestiniens appellent la Nakba, la
Catastrophe. Ils ont fui en Jordanie où cinq tantes et oncles du pasteur
Tannous vivent encore aujourd’hui, sans la moindre perspective de pouvoir retourner
dans leurs maisons.
Pour aller à
Jérusalem, qui est à une demi-heure de route, il leur faut un permis spécial
dont ils ne savent jamais s’il leur sera accordé ou non. Et même avec un
permis, ils trouveront sur leur route des postes de contrôle militaires.
L’ancien pasteur de la paroisse du pasteur Tannous habite près d’une colonie
israélienne et a peur que l’emplacement où il loge ne soit confisqué. Juste à
côté, à Bethléem, les nombreux camps de réfugiés sont remplis de plusieurs générations
de familles palestiniennes qui n’ont pu revenir chez elles depuis près de 60
ans. Le taux de sans-emploi en Palestine était de plus de 26% en 2014, alors
que la même année il était inférieur à 6% en Israël.
Le pasteur Tannous a
vu des chrétiens comme des musulmans de sa communauté quitter la Palestine pour
fuir le conflit, ou parce que c’est trop dur de gagner sa vie et de subvenir
aux besoins d’une famille. « C’est dur de garder la foi sous l’occupation,
dit-il. Le plus souvent, nous demandons à Dieu d’y mettre fin pour pouvoir
jouir d’une vie belle et paisible. Et quand nos prières ne sont pas exaucées,
quand les gens ne reçoivent pas ce qu’ils ont demandé, ils se sentent oubliés
par Dieu. »
« Le rôle de
l’Église dans ce contexte, dit le pasteur Tannous, est d’aider à maintenir
l’espoir en un avenir de paix et de plus grande justice. Et aussi de convaincre
nos membres que notre espérance, notre foi et notre amour ne proviennent pas des
humains mais du ciel, de Jésus Christ qui nous a appris comment espérer,
comment aimer, et comment apprécier notre vie ici-bas. »
Il croit très fort au
rôle de l’Église en Palestine, mais il n’a pas toujours l’impression que la
communauté chrétienne mondiale les soutient. Même si la Palestine est le pays
de Jésus, beaucoup de membres de la communauté chrétienne ailleurs dans le monde
sont surpris quand ils apprennent qu’il y a des chrétiens là-bas aujourd’hui.
« Malheureusement, dit-il, la plupart des chrétiens ailleurs dans le monde
ne savent pas qu’ils ont des frères et des sœurs chrétiens en Palestine qui se
battent pour la justice et la liberté. Les gens pensent que le christianisme
est venu d’Europe ou d’Amérique, et oublient qu’il vient d’ici, de cette Terre
sainte. »
Le pasteur Tannous
croit aussi que le rôle de tous les chrétiens est de transposer leur foi en
actes et de s’engager pour la fin de l’occupation et du conflit. Il aime bien
cette citation de Dietrich Bonhoeffer : ‘Une foi sans espérance est une
foi malade’, mais il irait plus loin pour demander aux chrétiens de bâtir des
relations et de plaider en faveur de la justice. « Je crois qu’une foi non
seulement sans espérance mais aussi sans amour, une foi qui ne construit pas
des ponts et qui ne s’engage pas en faveur des autres, une foi qui ne coopère
pas avec les autres et ne s’engage pas contre les humiliations et les postes de
contrôle et les murs, je crois qu’une telle foi est vraiment malade. »
« Si vous êtes
chrétien, dit-il, vous ne pouvez pas ne pas travailler en faveur de l’amour, de
la paix, et de la réconciliation. Il vous faut prendre la défense de ceux qui
vivent sous l’occupation ! ».Il sait bien qu’aucune des descriptions qu’il
fait ne pourra vraiment faire connaître à quoi ressemble la vie en Palestine. Il
sait que ses paroles seules ne mettront pas les gens en mouvement. C’est
pourquoi il invite les chrétiens du monde entier à venir et à voir les combats
pour la vie en Terre sainte : « Si les gens viennent et voient et se
rendent compte de la présence ici de chrétiens, et pas simplement de chrétiens
mais des premiers chrétiens, dit-il, cela pourrait changer bien des choses. »
Publié en premier par le Comité Central Mennonite (MCC) du
Canada sous https://mcccanada.ca/stories/land-bible et reproductible.
Action
Quelle que soit votre
foi ou votre philosophie, prenez contact avec les Églises de votre entourage et
dites-leur : C’est la semaine de prière pour la Palestine et pour Israël
dans le cadre du cycle de prière du Conseil Œcuménique des Églises. Les
chrétiens palestiniens ont demandé aux Églises du monde entier d’entendre leur
appel pour la justice. Ils vous supplient de ne pas ignorer l’injustice qu’ils
subissent et vous demandent : Pouvez-vous nous aider à retrouver notre
liberté afin que la paix, la justice et l’amour puissent prospérer en Terre
sainte ? S’il vous plait, soyez solidaires avec eux et faites entendre
leur appel. Pour en savoir davantage sur le cycle de prière du Conseil
Œcuménique des Églises, rendez-vous sur https://www.oikoumene.org/en/resources/prayer-cycle.
Participez à un culte
à l’église à laquelle vous vous êtes adressée. S’ils acceptent de parler
d’Israël et de la Palestine ou de prier pour eux, donnez le nom de l’église et
annoncez #SheSaidYes (#ElleaditOui) sur les médias sociaux. Si l’Église en
question a dit non, donnez le nom de cette église et annoncez #SheSaidNo (#ElleaditNon).
Ajoutez un lien vers cette page du site internet de Kumi Now avec le hashtag #ChristiansintheHolyLand
(#ChrétiensenTerreSainte), #KumiNow, et #Kumi11.
Littérature :
Le cantique “Yarabba Salaami”, connu et chanté par
beaucoup de chrétiens palestiniens :
Yarabba salaami amter
alayna salaam,
ياربَ السلامِ أمطر علينا السلام
(Dieu
de paix, fais tomber la paix sur nous comme une pluie)
Yarabba salaami im
la’ qulubana salaam.
ياربَ السلامِ إملاء قلوبنا سلام
(Dieu
de paix, remplis nos cœurs de paix)
Yarabba salaami amter
alayna salaam,
يارب السلام أمطر علينا السلام
(Dieu
de paix, fais tomber la paix sur nous comme une pluie)
Yarabba salaami
im’nah biladana salaam.
يارب السلام امنح بلادنا السلام
(Dieu
de paix, donne la paix à notre pays.)
Ressources (en anglais) :
- Un livre :
Palestinian
Christians: Emigration, Displacement and Diaspora (2017), publié par le pasteur
Mitri Raheb, auparavant pasteur de l’église évangélique luthérienne de Noël à
Bethléem et actuellement directeur de Diyar Consortium à Bethlehem.
- Trois articles (en anglais) :
“Why Christians Are Fleeing the Holy Land” par Klaus Wivel, dans Forward
: https://forward.com/culture/340335/why-christians-are-fleeing-the-holy-lands/
“For a shrinking group of Palestinians, Bethlehem is still a Promised
Land” par Vildana Hajric : https://medium.com/@VildanaHajric/for-a-shrinking-group-of-palestinians-bethlehem-is-still-a-promised-land-4e9e12785d00
“Lonely this Christmas: A Glimpse into the Life of the West Bank’s Last
Christians” par Dina Kraft, dans Haaretz : https://www.haaretz.com/middle-east-news/palestinians/MAGAZINE-a-glimpse-into-the-life-of-the-west-bank-s-last-christians-1.5629510
- Trois vidéos:
“Christian Emigration from the Holy Land, Causes and Numerical Data”, du
Christian Media Center : https://www.cmc-terrasanta.com/en/video/christians-in-the-holy-land-2/christian-emigration-from-the-holy-land-causes-and-numerical-data-13864.html
“Christians of the Holy Land”, de 60 Minutes : https://youtu.be/H5p8mZ-HN-0
“Palestinian Christians Under Israeli Occupation Speak Out” : https://youtu.be/kYWCpOHiNjk
- Un rapport :
“Report on Christian Emigration : Palestine”, de The Holy Land Christian
Ecumenical Foundation : https://hcef.org/106-report-on-christian-emigration-palestine/
Traduit de l’anglais par
Les Amis de Sabeel France
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